Les Imbault à Neuvy

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Narrée par Annick LAXAGUE, l'histoire nivernaise de ses ancêtres mariniers :

Je viens de réaliser la transcription de ma famille Imbault de Neuvy sur Loire, et j’ai d’abord été impressionnée par leur nombre à Neuvy, puis passionnée par leur vie. Par moment, lors du décès d’un jeune, on ne peut s’empêcher d’imaginer ce qui a pu se passer et on se questionne : qu’a-t-il pu arriver pour qu’à 22 ans, deux ans tout juste après s’être marié, avoir eu une petite fille, tout à coup, celui-ci décède ? Est-ce une maladie, un accident, qui a mis un terme à cette vie qui commençait tout juste ? On ne peut remonter le temps mais on le voudrait bien !

Les époux Imbault

Ma famille Imbault arrive vers 1833, avec leurs quatre enfants, depuis Beaulieu sur Loire, dans le Loiret. Mais apparemment, Ils viennent de plus loin, car les ainés sont nés à Châtillon sur Loire (45). Qu’ont-ils fuit ? Que recherchaient-ils ? Nous ne le saurons jamais… mais on peut supposer une famine, une épidémie, ou un manque de travail, tout simplement. Toujours est-il que Marie-Anne Cartonnet la mère de la petite famille, devait être affaiblie, car à peine arrivée à Neuvy sur Loire, elle décède. Et deux ans après elle, meurt le petit dernier, qui n’a même pas deux ans. Alors maladie ? Louis, malgré tout s’accroche et de simple pêcheur, il devient marinier. Mais il n’en a pas fini avec le malheur, sa fille de 17 ans, domestique, décède à son tour. Heureusement qu’il a ses deux grands fils qui apprennent avec lui le métier de marinier. Ils s’entendent bien et partagent les misères de leur vie quotidienne. A deux ans d’intervalle, chacun trouve sa chacune : Louis- fils épouse une fille de Beaulieu, Madeleine Meunier; un retour au village de son enfance ? Emile, lui s’intègre encore plus au paysage de Neuvy sur Loire, en épousant une fille du village, une Durat dont le papa est geôlier de la prison de Neuvy-sur-Loire. Chacun est le témoin de l’autre à leur mariage respectif. Chacun est parrain du premier de l’autre. Toute la famille vit sur l’eau et les grands-pères veillent sur leur progéniture ; ils vont les déclarer à la mairie lors des absences des fils, qui doivent remonter la Loire avec leurs marchandises pour gagner leur croûte. Les enfants grandissent, on les marie. Les filles de Louis partent l’une en Haute-Loire en 1840 avec un Pelardy, l’autre à Paris en 1847 avec un Caillot. Restent les fils de Louis : Jules, marinier, se marie avec fille de Boulleret (Cher), une Champault qui connait la dure vie des mariniers. Sur son visage, on lit les dures souffrances que la vie a laissées. Jean Clément le petit dernier, finit par se marier avec une Gaspard de Neuvy sur Loire, en 1880. Voila pour les enfants de Louis, tous mariniers comme lui.

Louis Imbault et sa famille

Mais la guigne ne les quitte pas. L’ainé d’Emile meurt, à peine marié et tout jeune père d’une petite fille. Pourtant on avait misé gros sur lui. Uni à une famille de marchand de poteries, c’étaient peut-être les poteries et les émaux de La Puisaye, célèbres dans toute la France, qui rentrait dans la famille, avec les Ramond. Puis en 1875, c’est au tour du cadet d’Emile : René Arthur, de mourir. Marinier, lui aussi, à 25 ans, on lui prédisait certainement un grand avenir. C’est le désespoir ! Dans la famille d’Emile, le troisième garçon préfèrera partir dans l’armée à Paris et son cadet le suivra dans cette grande ville ; Il y épousera une parisienne du onzième arrondissement : une fille Chapat. Il s’essaiera en petit peu à la marine, sur le canal, mais il y a déjà moins de travail, les bateaux à vapeurs prennent la relève et surtout on construit la voie ferrée, on gagne mieux sa vie en ville. De plus, on peut mieux éduquer les enfants à terre. Tous les enfants d’Emile savaient lire ! Quand peut-on envoyer les enfants à l’école, quand on est marinier ? Le travail est si dur, qu’il faut y être du matin au soir, il faut surveiller le fond, surveiller l’eau, surveiller la cargaison, surveiller les bateaux-moulin qui passent en vous faisant un remous à renverser un chalut.

Mais Louis le père, y croit encore à la navigation, marinier, ça l’a fait vivre, jusqu’à présent ! Il ne va pas partir maintenant. Depuis que Louis Emile son fils ainé est décédé, c’est jules qui a la responsabilité de la famille. Mais Jules, lui non plus n’a pas beaucoup de chance : son premier enfant meurt après cinquante jours de vie, et son premier fils, tant attendu, décède à onze mois. Seule lui reste une petite fille. Sa femme est manœuvre elle aussi, parce que marinier ça ne gagne plus sa croute. Il faut aller de plus en plus loin pour que ça paye. Elle ne peut pas continuer comme ça. En 1876, Louis Imbault Père décède. En 1879, nait Auguste Imbault. Celui-là, Jules a envie de le préserver. Il part donc à la recherche de travail ailleurs. Quelques années plus tard, il reviendra chercher toute sa petite famille qu’il installera à Argenteuil. Il a trouvé un travail : avec son bateau, il remonte les canaux de Paris jusqu’aux égouts, qu’il nettoie, c’est bien payé ! A Argenteuil, il aura 3 filles de plus. Seuls, au quai de Neuvy sur Loire, se balance le chaland de Jean Clément, qui avec ses deux filles et sa femme, cherche, désespérément, un autre travail. C’est que c’est difficile, il ne sait rien faire d’autre. Et sa femme non plus. Aucun des enfants de Louis ne savaient lire et écrire. Il finit par rejoindre ses cousins dans l’Essonne.

Cette fois- ci, c’est vraiment fini. Plus un seul Imbault dans la petite ville de Neuvy sur Loire. Seuls restent les souvenirs de leurs cris et rires, de leurs souffrances et la couleur si particulière des canaux de la Loire. C’est à ça, certainement que rêve Auguste, toute son adolescence. Mais il ne veut plus vivre aussi misérablement. On lui dit que là-bas à Nantes, sur la mer bleue, partent de gros bateaux pour des pays lointains. On lui dit qu’ils embauchent à tour de bras et qu’ils payent bien. Il a 16 ans, il sait naviguer, il sait écrire. Il s’en va. C’est ainsi qu’Auguste arrivera à l’Île Bourbon (île de la Réunion), à 17 ans à peine. Il fait la connaissance d’une Melle Techer Marie-Clémentine. Ils eurent un beau bébé quelques mois plus tard : mon grand-père, Louis Imbault, et partirent à Madagascar. Auguste grimpera les échelons à force de travail et finira Directeur des lignes de Bateaux Scandinaves. Il pût donc réaliser son rêve : offrir une vraie maison à ses parents à l’Île Saint Denis (93). S’en était finit de la vie de marinier mais pour lui c’était une autre vie tropicale et océanique qui s’ouvrait devant lui. Un avenir rempli de promesses et de découvertes.

C’est avec émotion, que j’ai retracée le parcours de toute ma famille Imbault de Neuvy que je ne connaissais pas, de retrouver leur culture, us et coutumes. Je n’aurais jamais imaginé que mes ancêtres avaient pu exercer le métier de mariniers. L’eau, je connaissais, ou plutôt l’océan, moi qui fait partie de cette troisième génération née sur l’ile de Madagascar. Mais à aucun moment je ne me suis demandée ce qui avait amené mon arrière grand-père à prendre la mer, pour naviguer si loin. Maintenant tout s’éclaire ! Quand on est né sur l’eau, il est difficile de l’oublier.


Je remercie mes cousins Imbault, tout nouvellement retrouvés, de me raconter leur passé afin que je puisses faire le lien entre les cultures et générations. Je remercie aussi tous les colistiers de GenNièvre et plus particulièrement ceux qui m’ont aidée à retrouver ma famille Imbault