Rafle de Decize

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Le bal de la classe 44(1).

  • Le cinq février 1944, ils organisent un banquet et un bal près de Brain. Un parquet a été monté. Il y a environ 500 jeunes gens et jeunes filles. L'ambiance est à la fête, sans doute pour masquer l'inquiétude et le départ inéluctable au S.T.O.
  • Roger Jaillot raconte cet épisode dramatique : « Les danses se succèdent et bientôt l'assistance entonne la Marseillaise, il n'y a plus de retenue... Après tout nous sommes en France !
  • C'est minuit, heure fatidique... Le 6 février commence ! Malgré le froid glacial du dehors, il fait vraiment chaud sous ce parquet et nous sortons avec un copain prendre l'air. À la porte, un homme grand, d'allure inquiétante, qui n'avait rien d'un Français, se tient là et regarde, impassible, le joyeux spectacle qui s'offre à ses yeux.
  • Un avion passe à faible altitude... Soupçonneux « nous sommes payés pour l'être », je fais part de mon pressentiment à mon copain qui, lui, est plus optimiste que moi. Me souvenant des paroles de mon père, je ne tarde pas à craindre le pire, nous sommes trahis !
  • Mais nous restons dehors, à côté de cet individu qui ne nous inspire pas confiance. L'avion passe et repasse... À l'intérieur quelqu'un éteint les lumières au passage de l'avion, puis l'orchestre reprend. Peu de temps après, des rafales de mitraillettes, la lumière coupée, nous sommes encerclés ; instinctivement nous rentrons sous le parquet. Mais aussitôt, l'évacuation commence, accompagnée des hurlements des S.S., des coups de crosse de fusil, des coups de poings, de bottes, à tel point qu'il est difficile de dire qui n'a pas eu sa correction... Nous sommes alignés, comptés, les mains sur la tête ; à la moindre parole, nous faisons connaissance avec la crosse d'un fusil ou la botte de cette élite hitlérienne(2).
  • Les prisonniers sont conduits à la caserne de gendarmerie mobile, où ils sont comptés, triés. René Volut témoigne de leurs inquiétudes : « Nous sommes donc réunis, les filles dans une salle, les garçons dans une autre. Un gros capitaine nous fait un petit discours d'une bonne demi-heure, dont je ne me rappelle que la dernière phrase : Vous êtes tous communistes. Vous serez fusillés. »
  • Après la nuit et la matinée passées à 200 dans cette pièce, nouveau défilé de la caserne à la gare. Quelques personnes âgées et les moins de 17 ans furent renvoyés chez eux ; pour les filles, moyennant deux ou trois francs de l'époque, les parents ont pu les récupérer(3). Donc, [nous avançons,] bien encadrés par presque autant de soldats et de mitraillettes ! Quelques personnes qui apportaient des vêtements furent même prises dans la bande. Nous avons été embarqués dans des wagons à bestiaux en direction de Nevers. Nouveau défilé vers l'École Normale, qui servait de prison, de centre de rassemblement - et quelquefois de torture - pour les départs en Allemagne(4)."

(1) Cf. Roger Jaillot, Le Bal de la classe, Decize, 1985, et La Vérité, Decize, 2001.
(2) Roger Jaillot, op. cit., p. 10.
(3) Les Allemands ont promis aux femmes et aux jeunes filles de les libérer contre rançon. M. Kurtz, Lorrain demeurant à Decize et interprète des forces allemandes, obtient qu’un délai suffisant soit concédé afin d’avertir les familles. Témoignage de Mme Foucher, 5 avril 2003.
(4) René Volut, documents personnels.)


Texte de Pierre Volut http://histoiresdedecize.pagesperso-orange.fr/index.htm et http://lesbleuetsdecizois.blogspot.fr/ mis en page par --Mnoel 12 décembre 2014 à 15:09 (CET)