Révolution-Doléances de Cossaye

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Doléances du Tiers etat de la paroisse de cossaye

Il est arrivé ces heureux tems où le tiers état va sortir de l'oppression où il a été réduit jusqu'ici puisqu'il a recouvré la liberté d'exposer ses plaintes et les abus, que ne puisse-t-il en voir l'anéantissement ?

1er abus : L'exemption pécuniaire ne seroit il pas juste que la Noblesse et cette foule de privilégiés de tous états partageat la charge des impositions avec le tiers , chacun en raison de ses propriétés ?

2e abus : la confection des rolles faite par les nobles et privilégiés. Dans cette hypothèse, la justice distributive sera lésée à coup sur. Le noble et le privilégié guidé par l'intérêt personnel allègeront leurs cottes et les cottes de ceux de leur ordre. Par ce moyen le tiers sera toujours opprimé. Il est une manière de remédier à cet abus, c'est que chaque municipalité fasse ses rolles.

3e abus : tous les droits seigneuriaux qui sont la corvée particulière , le droit d'avoir des pigeons sans qu'il soit permis de les éloigner des productions qu'ils dévorent le droit de chasser, de pêcher, les droits de bléerie, dépaves, de péages, etc De combien de maux ne sont-ils pas la Source pour le peuple Combien de procès d'amendes d'emprisonnements sans parler des dégâts faits par les Seigneurs chasseurs ; le tiers loin de réclamer dans ces différents maux a été jusqu'ici forcé au plus profond silence . Mais ces droits une fois proscripts, qu'auroient donc les seigneurs ? Compte-t-on pour rien leurs grandes propriétés, leurs vastes enclos, leurs vergers, leurs vignes, leurs préz, leurs étangs, leurs bois, leurs moulins, leurs forges, leurs métairies, leurs terriers, leurs pensions, leurs emplois lucratifs et honorables.
Les Nobles et les privilégiés nous objecteront qu'ils consacrent une partie de leurs biens à faire travailler le malheureux, que pour cette raison ils méritent de jouir des exemptions pécuniaires et d'être maintenus dans tous leurs droits. ce prétexte d'exemption est absolument illusoire. Qu'on ne s'y trompe pas ! Si le Noble le privilégié fait travailler

1° n'est-ce pas pour son utilité propre ? si le manoeuvre lui donne ses peines ses sueurs tout le fruit n'est-il pas pour le riche !
2° Si le Riche, le puissant, le Noble, le privilégié fait travailler le pauvre manoeuvre qu'en retire celui-ci? douze ou quinze sols et en quel tems est-il employé par le Noble ? sans doute ce n'est pas dans les mauvais tems . or, d'après cet exposé laconique jugez nous ô puissants, ô nobles, ô privilégiés ! décidez de notre sort. Si vous avez mérité des privilèges, vous ne manquez sûrement pas de cette justice qui constitue l'honnête homme. des 12 ou 13 sols que vous payez le tribut journalier de nos sueurs, lorsque vous avez daigné nous occuper, qu'en ferez-vous pour notre bonheur où vous seriez embarrassés et bien il faut que notre bouche vous instruise. les 12 sols gagnés dans le mauvais tems et les 15 dans les grands et beaux jours de l'été servent
1° à nourrir l'ouvrier sa femme et ses enfans quel qu'en soit le nombre
2° à les vêtir tous
3° à payer le loyer de leurs pauvres demeures
4° à payer la taille, la capitation, la corvée royale et seigneuriale
5° subvenir à nos maladies
6° combien ne faut-il pas retrancher de ces petites sommes par rapport aux dimanches et festes
7° combien de journées ne perdons nous pas faute d'être mis en oeuvre ou parce que vous ne pouvez employer la grande quantité des individus malheureux qui se trouvent dans l'étendue de vos seigneuries
8° la misère nous forçant quelquefois à des contraventions c'est encor sur les 12 ou 15 sols qu'il nous faut prendre de quoi nous libérer 9° les détails immenses des ménages quelques petits qu'ils soient encor pris sur ces petits revenus journaliers

4e abus : dans les gabelles, droits perçus sur tout comestibles et denrée de nécessité. la taille et les vingtiemes tels que ces deux impots subsistent versés immédiatement dans les coffres du roy et sans frais pourroient suppléer ces différens droits abolis, et dont la perception coûte immensément et tourne au profit de milliers d'employés inutiles à l'état. si la taille, la capitation et les vingtiemes ne suffisoient pas pour le remplacement de tout autre droit perçu, on peut les augmenter l'augmentation sera à peine apperçue puisqu'il n'y aura plus d'exempt en france. d'après une si heureuse révolution , la paix regneroit véritablement il ne bruleroit pas dans le royaume ce feu continuel d'une guerre intestine d'un million de sujets contre 23 autres millions. les commis ne seroient plus aux prises avec les sujets du roy juste et bon qui nous gouverne. il n'y auroit plus de procès de concussions d'emprisonnements de supplices de meurtres maux qui vexent cruellement des familles sans nombre

5e abus : les intendants de provinces pour lesquels il faut des sommes immenses. les fermiers généraux, les receveurs des tailles, les élections, les justices seigneuriales, l'étendue du ressort des parlements, tant d'entrepreneurs, d'inspecteurs, de protégés payés et gratifiés à l'excès. il seroit nécessaire de reformer les abus dans l'administration de la justice on trouverait dans l'établissement des municipalités des ressources satisfaisantes pour remplacer les individus qui pèsent sur l'état sans lui être d'aucune utilité. on pourroit encor abolir les officiers des eaux et forêts, ainsi que les gouvernements ; ces médecins sous le nom de médecin du Roy ; ceux des villes qui les valent bien les suppléeroient sans être à charge à l'état. il faudroit en outre proscrire ces jurés priseurs fléaux des héritiers et des successions.

6e : le Roy réclame des secours. il est juste que son peuple lui en fournisse. mais que de trésors a sa disposition dans le sein même de son royaume nous entendons les biens des religieux. cette espèce d'hommes a cessé d'être utile à l'état qu'elle a éclairé autrefois et qu'elle a enrichi par ses travaux. elle est maintenant dans le cas de lui être également utile. chaque province auroit la propriété des monastères et de leurs biens qu'elle renfermeroit dans son enceinte. elle auroit la liberté de les vendre ou de les employer d'une manière qui lui seroit utile. dans cette hypothèse, elle feroit une modique pension à chaque religieux qui se rendroient utiles dans les paroisses en y servant comme vicaires et ensuite comme curés. qui doute que la plupart de ces individus ne fusse contents d'un pareil sort . ils béniroient amplement la main qui auroit brisé leurs chaines.

7e le Tiers état voit avec une satisfaction singulière qui va être admis aux assemblées et aux états où il sera traité de ses intérêts, en nombre égal à celui de la noblesse et du clergé réunis il voit aussi avec une joie commplette, que ses curés vont occuper des places dans ces états, parce qu'il les regarde comme ses amis et ses bienfaiteurs. heureux siècle pour la nation française. Si vous opérez la révolution, que vous êtes heureux, Louis seize ! vous mériterez à juste titre d'être apellé le père du peuple. Vous aurez une place dans les coeurs des individus qui composent cette nation sur laquelle vous regniez. et vous immortel xx (Vécre?) vous mériterez à jamais les hommages et la reconnaissance du peuple françois

Signatures :
Guyot Girault coquat guillaumin jobert p.f.

  • Source : Archives Départementales de la Nièvre - Cote 1 L 161-162 - Cahiers de doléances (1789)) - n°16
  • Document déchiffré et reproduit tel quel par Sylvie Drure (GenNièvre)