Nevers rue des Jacobins

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RUE DES JACOBINS à NEVERS

  • Cette rue, qui aboutit à la rue Saint-Genest par un escalier de 24 marches, devait descendre autrefois jusqu'à la Porte du Croux, puisqu'on cite en 1436 la rue depuis la Porte du Croux jusques aux Jacobins.
    C'est au mois de novembre 1271 qu' Agnès de Bourbon, veuve de Jean de Bourgogne, et sœur de Mahaut de Bourbon, comtesse de Nevers, donna aux Jacobins ou Frères prêcheurs, religieux de d'ordre de Saint-Dominique, la maison qu'elle avait à Nevers, attenant aux anciens murs de la ville (enceinte gallo romaine), derrière la cathédrale, pour y bâtir un monastère de leur ordre, et les en investit en la personne de Gui de Sulli, jacobin, son cousin. Les Jacobins tiraient leur nom de l'église Saint-Jacques de Paris, près de laquelle leur couvent était bâti. Le souvenir de la donation qui leur fut faite était rappelé par ce quatrain, qui se lisait sur une verrière de leur église :
Agnès, dame de Bourbonnois,
qui fut des hoirs du Nivernois,
donna aux Prescheurs sa maison
pour y faire lieu d'oraison.
  • La donation date de 1271, mais l'installation définitive des Jacobins ne dut se faire qu'en 1296, année de l'autorisation donnée par l'évêque de Nevers, Jean de Savigny, qui bénit, en 1305, leur église dédiée à la Sainte Vierge et à Saint Louis. On raconte qu'un autre évêque, Maurice de Coulanges, fit arrêter et conduire dans les prisons de Paris Adam de Soissons, prieur des Jacobins, pour avoir dit publiquement que « la Vierge a été conçue en péché originel et que si elle fût morte avant la Passion de Jésus-Christ, elle serait descendue en enfer ». Le 16 mai 1389, en présence des députés de l'Université de Paris, Adam fut obligé de rétracter ses erreurs contre I'Immaculée-Conception qui n'était cependant pas un dogme. Augmentée en 1388, l'église fut de nouveau consacrée en 1405.
    En 1393, les Jacobins firent construire leur tour, ce qui porta ombrage à l'abbesse de Notre-Dame. Il y eut à ce propos de gros démêlés et même des voies de fait.
    Pendant la nuit de la Saint-Laurent, 1463, le feu prit au dortoir des Jacobins, le brûla avec plusieurs maisons voisines, mais on put préserver l'église. Le cloître fut rebâti en 1532.
    Sept ans plus tard, on condamna à la peine de mort, pour homicide commis sur un « compagnon » inconnu, Jean Taboule, dit le Capitaine, hôte du logis où pend pour enseigne Le Dauphin, près de l'église des Jacobins et de la porte du Croux, et Drouin de Mesles, boulanger.
    En 1739, il n'y avait plus dans le couvent, avec le prieur, que deux religieux et un frère.
    En 1761, les Jacobins s'avisèrent de clore par un mur la rue passant le long de leur église et allant de la rue du Cloître-Saint-Cyr aux rues de la Tartre(1) et du Croux(2). Protestations des doyen, chanoines et Chapitre de la cathédrale contre cette entreprise « aussi contraire au bien public qu'aux droits particuliers ». Les Jacobins, de leur côté, soutenaient que ce n'était point une rue, qu'ils avaient droit de fermer ce passage qui leur appartenait et qu'ils avaient eu juste raison de le faire, à cause des ordures que le peuple y faisait habituellement.
    Le 16 août de la même année, une transaction intervient entre les moines, le maire, les échevins et le procureur du roi : la ville s'engage à donner 700 livres une fois payées et 10 livres d'aumônes annuelles. Les Jacobins consentiront à laisser la porte de la rue de la Tartre(1) ouverte de six heures du matin à six heures du soir, en hiver, et de six heures du matin à huit heures du soir en été. L'entretien sera aux frais des moines;
    Acheté par la ville en 1790, moyennant la somme de 14.100 livres, pour en faire une maison d'incurables, le couvent fut, pendant la Terreur, transformé en prison pour les femmes de toutes classes et de tous les mondes.
    Le 7 prairial an II (26 mai 1794), l'administration du district décida que le Département serait invité à faire démolir l'église. Le clocher avait été abattu en 1793.
    Le 16 nivôse an III (5 janvier 1795), le ci-devant couvent des Jacobins, ci-devant maison d'arrêt, fut choisi pour servir d'hospice aux filles enceintes. Il ne conserva que quelques mois cette affectation.
    En 1814, on entassa dans le couvent des Jacobins une partie des prisonniers de guerre internés à Nevers. Plus tard, M. Jousselin l'acquit et y établit une imprimerie qui avait pour enseigne Imprimerie nationale ; il en fit ensuite une manufacture de fayence et poterie allant au feu.
    En 1821, le couvent fut racheté par MM, de Cayrol, député de la Nièvre, de Maumigny, de Sainte-Marie, de Bouille et Groult, vicaire général. Il fut réparé, au moyen d'offrandes, pour y établir des Frères de la Doctrine chrétienne qui y furent solennellement installés le 5 novembre de la même année. On écrivit, au-dessus de la porte d'entrée, changée alors de place :

    A la religion soyez toujours fidèle,

    On ne sera jamais honnête homme sans elle.


    (1) Actuelle rue du 14 Juillet.
    (2) Actuelle rue de la Porte du Croux.


    Victor GUENEAU dans Mémoires de la Société académique du Nivernais – 1925/T27