Nevers rue de l'Oratoire

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RUE DE L'ORATOIRE à NEVERS

  • Elle est formée de plusieurs anciennes rues. 1° de la rue des Rétifs : 2° d'une partie de la rue de la Parcheminerie ; 3° d'une partie de la rue de la Coutellerie(1) ; elle allait un moment jusqu'à la rue de Nièvre, ayant absorbé la rue des Boyaux(2).
    La rue des Rétifs (d'abord portion de la rue du Four, puis rue de la Chambre des Comptes) prit sans doute ce nom par allusion aux habitants des prisons seigneuriales installées à côté et en-dessous de cette Chambre des Comptes. Elle allait de la place de la République à la rue Adam Billault. Son nom est gravé aux deux coins de son débouché sur la place de la République. Sur le plan de 1855, elle est dite rue de la Prison.
    Dès 1398, il existait à Nevers une Chambre des Deniers ; elle prit le nom de Chambre des Comptes vers 1405 et siégea dans une maison acquise en 1463, de Jean d'Aizy et de Jacqueline du Bois, sa femme. Les bâtiments avaient été construits vers la fin du XIVe siècle, les armes des comtes de la maison de Bourgogne y figurent à divers endroits. C'est dans cette rue que se tenait le marché de la chaux, des tuiles, carreaux et du charbon, amenés par la porte de Loire. Pendant la Révolution, les locaux de la Chambre des Comptes furent pris pour agrandir les prisons, en même temps qu'on utilisa, pour le même usage, la maison voisine, n° 40, hôtel Gascoing de Villecourt(3)
    Sous l'Empire, Mme de Brissac, fille du dernier duc de Nivernais, demanda au département de lui rendre son bien ou de le lui payer. Les choses traînant en longueur, elle céda ses droits à M. Roy, qui obtint du département 8.800 francs pour onze ans de loyer et 25.000 pour prix de la vente.
    En 1855, les prisonniers furent transférés dans la rue Félix Faure(4) et les bâtiments utilisés, jusqu'en 1882, pour un dépôt de mendicité.
    Le département vendit alors en trois lots tout ce qui lui appartenait.
    Le n° 36 fut occupé par la Loge maçonnique l'Humanité. Le n° 38, est une maison d'habitation à deux portes du XVe siècle, une grande et une petite, l'une à côté de l'autre, ouvertes sous des accolades garnies de crochets, flanquées de pinacles naissant à la hauteur des accolades. Au-dessus de la grande porte se trouve un écusson complètement détérioré.(5) Enfin, le n° 40 a cessé depuis la fin de la Révolution d'être une annexe des prisons. La seconde partie de la rue de l'Oratoire (de la rue Adam Billault à la dernière maison à droite en descendant, laquelle faisait autrefois le coin de la rue des Jaloux(6) est une ancienne section de la rue de la Parcheminerie. Ce dernier nom est gravé sur la maison précitée et à l'angle de la rue des Quatre Fils Aymond.
    Par donation de 1618, Léonard Destrappes, archevêque d'Auch, originaire de Nevers, appela les prêtres de l'Oratoire dans notre ville et leur donna trois maisons, ainsi que les seigneuries de Chaluzy, Trangy, etc. L'une des trois maisons fut abattue pour aménager l'entrée et la cour ; les deux autres formèrent l'habitation des Pères. L'emplacement que devaient occuper les Oratoriens englobait une petite rue descendant au Rivage ; elle avait été abandonnée au donateur en 1602, à condition qu'il reculerait ses bâtiments pour élargir la rue venant de la place Ducale(7) et laisserait au public la liberté d'accès au puits. A partir de 1655, les Pères achetèrent plusieurs maisons, six au moins, et les firent démolir pour construire une chapelle. Vingt ans plus tard, M. de Précy, marquis de Sancergues, petit-neveu de Léonard Destrappes, donna, par testament, dix mille livres pour cette chapelle, à condition qu'on y ensevelirait son corps et qu'on prierait pour lui. En 1681, l'évêque bénissait cet édifice(8). On voit encore cette chapelle de style classique très simple malgré les quatre piliers corinthiens qui ornent son portail dont la partie supérieure est mutilée(9). En 1789, il n'y avait plus que deux Pères très âgés. L'église servit de salle de réunion à la Société populaire. L'administration du district, puis, en l'an IV, la municipalité, s'installèrent à côté, dans l'hôtel de Bonnay, ce qui fit alors nommer quelque temps cette rue rue ou descente de la Municipalité.
    Les locaux de l'Oratoire, devenus propriété nationale, furent vendus et transformés partie en magasins, partie en écurie. En 1827, l'évêque Millaux racheta la plus grosse part, dans l'intention de l'utiliser spécialement pour le petit séminaire. L'évêque Dufêtre acquit le reste des bâtiments en 1855. Fermée en 1833, utilisée comme prison en 1851, réouverte en 1855, en même temps que l'institution ecclésiastique Saint-Cyr, la chapelle fut rendue au culte sous le nom d' Oratoire de Saint-Dominique. Le tout fut occupé par les Pères Maristes. Ceux-ci ayant été expulsés le 16 mai 1903, la chapelle, fermée le 3 juin, fut attribuée au département par décret du 22 février 1910. Celui-ci vendit tout l'ensemble, couvent et chapelle, le 11 juin 1921, à M. Blaudin de Thé. Les Maristes, rentrés un mois auparavant, s'y réinstallèrent aussitôt.
    La troisième partie de la rue de l'Oratoire, portion de l'ancienne rue de la Coutellerie,(1) allant de la rue des Jaloux(6) à la place de la Revenderie(10) fut absorbée, en 1865, par la rue Impériale (partie méridionale de la rue du Commerce(11))
    On remarquait, en 1810, à peu près en face de la rue des Jaloux,(6) l'enseigne du perruquier Potin : « Au temps perdu ». Ce facétieux personnage plaçait, chaque matin, au-dessus de sa boutique, un grand tableau représentant un cavalier passant au galop sous un arbre et suspendu aux branches par sa longue chevelure. Au-dessous ces vers :

Mes cheveux me font tort,
Hélas ! quel triste sort!
J'aimerais mieux porter perruque
Que d'être pendu par la nuque.

  • La dernière partie de la rue de l'Oratoire, au delà de la rue du Commerce,(11) a pris, en 1892, le nom de Ferdinand Gambon. Elle s'appelait jadis rue des Boyaux, en 1436, elle est dite rue ès-Boyaulx ; en 1777, elle porte encore ce nom qui est gravé au coin de la rue Saint-Vincent.

    (1) Voir rue du Commerce.
    (2) Voir rue Ferdinand Gambon.
    (3) On désignait couramment la prison de la rue de l'Oratoire sous le nom d' Hôtel du Pigeon Blanc, sans doute à cause du pigeon de faïence (disparu en 1942) qui surmonte la tourelle.
    (4) Actuelle rue Paul Vaillant-Couturier.
    (5) En 1912, le Syndicat d'initiative a fait apposer à côté de cette porte une plaque de marbre portant l'inscription suivante :
    CHAMBRE DES COMPTES
    DU DUCHÉ DU NIVERNOIS
    CRÉÉE PAR PHILIPPE DE BOURGOGNE
    1405-1789
    PRISON DÉPARTEMENTALE 1789-1862
    Cette inscription est inexacte : La prison fut seigneuriale jusqu'en 1790, nationale de 1790 à 1855 et non 1862 Elle ne fut jamais départementale.
    (6) La ruelle du Rivage, disparue lors de la création de la rue Impériale (rue du Commerce devenue rue François Mitterrand) fut vulgairement désignée sous le nom de rue des Jaloux.
    (7) Actuelle place de la République.
    (8) C'est vers ce temps que la rue prit le nom de rue de l'Oratoire.
    (9) Ce portail est classé comme monument historique.
    (10) Actuelle place Mancini.
    (11) Actuelle rue François Mitterrand.


    Victor GUENEAU dans Mémoires de la Société académique du Nivernais – 1927/T29