Bonheur Rosa

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Rosa Bonheur n'est pas née dans la Nièvre et n'y est pas inhumée. Pourtant, elle a laissé des traces de son passage dans notre département. Lui consacrer un article nous a semblé tout à fait légitime.

Le 16 mars 1822, naissait à Bordeaux, Rosalie Bonheur dite Rosa Bonheur. Son acte de naissance dit qu’elle est née d’Oscar Raimond Bonheur, qu’il est âgé de 26 ans et qu’il est professeur de dessin. Sa mère, âgée de 24 ans, est née à Altona en Allemagne et est seulement prénommée Sophie car née de père et de mère inconnus.

Leur acte de mariage du 21 mai 1821 à Bordeaux ne donne pas plus de précisions. L’acte de décès de Rosa du 25 mai 1899 au château de By, commune de Thomery (Seine-et-Marne), l’a prénomme Marie Rosalie et sa mère porte le patronyme Marquis (dans d’autres actes la mère porte les prénoms de Christine, Dorothée, Sophie). La mère de Rosa a été recueillie par un notable bordelais du nom de Jean-Baptiste Dublan de Lahet et est devenue une musicienne accomplie. Celui-ci lui aurait avoué sur son lit de mort qu’il était son véritable père.

La famille s’agrandit en 1824 et 1827 avec la naissance de deux fils, Auguste et Isidore. En 1828, Raymond part s’installer à Paris en espérant reconnaissance et fortune. Sa famille le rejoint en 1829. Le 19 juillet 1830 naît une fille : Joséphine, Marie, Julie, Victoire qui sera communément appelée Juliette. Les Bonheur vivent dans la gêne financière mais fréquentent les milieux intellectuels.

En août 1833 Sophie Bonheur meurt alors que Rosa n’a que 11 ans. Elle est enterrée dans la fosse commune au cimetière de Montmartre, les moyens financiers d’un enterrement décent n’étant pas là.

Raymond, adepte de l’idéologie saint-simonienne, quitte le couvent de Ménilmontant dans lequel il s’est installé en 1832 pour une durée de six mois. Pendant ce temps, c’est Sophie qui assurre la subsistance de la famille en donnant des cours de piano et en faisant des travaux à l’aiguille. Il regagne son atelier et décide d’y faire venir ses deux fils qu’il a placés dans un pensionnat en échange de leçons de dessin qu’il y donne. Quant à Rosa elle est alors placée chez une couturière mais cet apprentissage ne lui sied guère et se montre d’une maladresse désespérante. Devant cette réalité, son père obtient pour elle dans une pension de jeunes filles où il est professeur, le même avantage que pour ses deux autres enfants. La majeure partie des pensionnaires appartient à de riches familles mais Rosa s’y sent à l’aise. Elle se montre espiègle et n’est pas la dernière à faire subir quelques mauvais tours à ses professeurs. La partie études proprement dite a un succès plus que moyen. Son côté turbulent, voire un peu sauvage, se plie difficilement à la méthode d’enseignement. Elle subit quelques humiliations dues à son manque évident de richesse. Son caractère se durcit et son attitude devient insupportable pour ses professeurs. Son père se résout à la retirer du pensionnat.

Il lui fait alors faire des études sérieuses et l’envoie au Louvre afin qu’elle s’imprègne des dessins de maîtres et qu’elle y trouve sa voie. Elle y passe des journées entières, est enfin dans son élément et travaille avec ardeur à la copie de toiles de maîtres. Ces copies sont alors vendues mais la recette est bien maigre et il faut donc produire plus pour apporter un peu d’aisance financière à la famille. À 17 ans, Rosa commence à étudier les animaux en déambulant dans l’abattoir du Roule. Elle dessine en plein air, en pleine campagne ou encore au parc Monceau.

Raymond Bonheur se remarie, amenant ainsi deux nouvelles bouches à nourrir. Il faut donc redoubler d’énergie pour subvenir aux besoins de toute celle nouvelle famille. Tout le monde travaille d’arrache-pied sous la protection du père qui sera le seul formateur et le seul maître de chacun de ses enfants.

Rosa Bonheur expose pour la première fois au Salon de 1841 en représentant moutons, chèvres et lapins. Ce premier sujet semble avoir tracé son avenir d’artiste. Elle deviendra la peintre des paysages campagnards et des scènes champêtres, le tout dans des toiles immenses.

En 1842 elle expose de nouveau puis les années suivantes de manière bien rythmée. En 1847 elle expose plusieurs toiles inspirées d’un voyage dans le Cantal. Théophile Gauthier sera particulièrement élogieux dans un article de presse du 15 janvier 1853 qui fait suite à l’exposition de 1852 à laquelle ont participé Auguste, Isidore et Juliette Bonheur. Il écrit : Rosa Bonheur, l’étoile la plus brillante de cette pléiade de talents, la grande illustration de cette famille et de cette école.

Son travail est récompensé par la ville de Rouen qui lui décerne une médaille de bronze puis une médaille d’argent. Quant à la ville de Paris ce sera une médaille d’or.

À cette époque elle rencontre Pierre-Jules Mêne, lui aussi artiste animalier, avec lequel elle entretiendra une longue amitié ainsi qu’avec son fils le sculpteur Auguste Cain et le fils de celui-ci, Georges Cain. C’est au cours des années 1850 que Rosa Bonheur connaîtra non seulement la reconnaissance de ses pairs mais aussi un certain succès populaire.

En 1849, année du décès de son père, elle devient le seul soutien de la famille et reprend la direction de l’École Nationale de dessin de jeunes filles, fait travailler ses frères et présente le Labourage nivernais, appelé aussi Le sombrage. L’État lui en avait passé commande un an auparavant pour la somme de 3000 francs. Cette toile représente des bœufs du Charolais-Nivernais et est impressionnante par ses dimensions : 1,34 m de hauteur et 2,60 m de largeur. Le succès sera proportionnel ! Rosa Bonheur n’a que 27 ans et cette toile lui vaudra une première médaille d’or.

Le château de la Cave
Le château du chêne

L’artiste a résidé pendant plusieurs mois entre 1848 et 1852 au domaine du Chêne (autrefois château de la Cave) à Beaumont Sardolles. Elle s’est liée d’amitié avec les Mathieu alors habitants du domaine, riche famille d’éleveurs qui a introduit la race charolaise dans les Amognes. C’est ce lieu qui lui a inspiré l’œuvre. Le château a été reconstruit plusieurs fois. Le premier est tombé en ruine, le second a brûlé et le troisième est celui que l’on peut voir aujourd’hui. Construit en 1853 il n’est donc plus possible de voir la chambre où elle séjourna. Pourtant, des touristes du monde entier viennent visiter les lieux, « sur les traces de Rosa Bonheur ». Sa bibliothèque renferme de nombreux livres consacrés à l’artiste.

En 1853, elle présente le Marché aux chevaux. C’est une immense toile longue de 5,00 m qui dépassera les frontières nationales et recevra des compliments dithyrambiques. Elle sera vendue à un marchand américain pour la somme de 40 000 francs et revendu ensuite pour plus de 200 000 francs. Il est conservé au Metropolitan Museum of Art, à New-York depuis 1987. Après ce succès retentissant, Rosa Bonheur recevra une nouvelle commande de l’État. Ce sera La Fenaison en Auvergne et le public la découvrira à l’Exposition universelle de 1855. Après cette année 1855, elle n’est plus présente sur les salons laissant ainsi la place à ses frères et sœur.

Devenue un peintre connu et recherché, Rosa Bonheur reçoit de nombreuses commandes et est soutenue par les marchands. Avec l’argent gagné, elle achète le château de By dans la commune de Thomery qui date du 15e siècle le 9 août 1859 pour un montant de 50 000 francs. Elle s’y installe en 1860 après avoir fait quelques modifications, passe sa vie entre son atelier et ses animaux et ne cesse de peindre. On dit qu’elle eut des bœufs, des biches, des béliers, voire même des lions. L’un de ses fauves faisait de tels bonds dans sa cage qu’il fallut la suspendre pour empêcher qu’elle ne fut brisée. Des lionceaux d’humeur plus douce suivaient leur maîtresse pas à pas et gémissaient comme des enfants lorsqu’ils étaient séparés.

À partir de 1871, Rosa Bonheur se tourne vers la peinture de fauves qu’elle étudie au Jardin des Plantes mais également chez elle puisqu’elle possède un couple de lions acquis en 1880. En 1885 elle accueille un couple de « chats sauvages » qui ne sont autres que deux lionceaux et elle décide de les garder. Elle s’intéressera également à la photographie et aux Indiens.

Le château, acquis le 15 septembre 2017 par Katherine Brault, est ouvert au public en 2018. Quantité d’archives, de dessins, d’esquisses, de documents restent à découvrir, enfouis dans placards et combles. L’artiste restera fidèle toute sa vie au mouvement naturaliste animalier. Cet art étant peu prisé en France, c’est surtout en Angleterre et aux États-Unis que Rosa Bonheur sera appréciée.

Elle propose parfois comme titre de ses œuvres le nom scientifique des races animales, permettant non seulement de les identifier mais également de les localiser géographiquement. Elle crée notamment des planches zoologiques pour l’ouvrage Les races bovines au Concours universel agricole de Paris en 1856.

En 1865, elle reçoit l’impératrice Eugénie dans son château de By qui vient la décorer du grade de chevalier de la Légion d’Honneur. Elle sera la première femme artiste à recevoir un tel honneur. Le 12 mai 1894 elle est promue officier de la Légion d’Honneur et c’est Sadi Carnot qui la décorera. Cette fois encore elle est la première femme à recevoir une telle récompense. Des nations étrangères lui manifestent leur admiration : elle est chevalier de l’ordre de Léopold (Belgique), de l’ordre de Saint-Charles (Monaco), commandeur de l’ordre d’Isabelle-la-catholique (Espagne).

Rosa Bonheur fait partie des quelques grandes figures féminines libres du 19e siècle. Telle George Sand, elle obtient le droit de travestissement et porte constamment blouse et pantalon. Elle justifie l’obtention en 1842 auprès du Préfet de police « pour raison de santé ». Elle trouve cette tenue plus pratique pour observer les animaux dans les fermes et les champs. Elle n’en délaisse pas pour autant robes et jupes. Placée dans une école de garçons, elle s’est toujours considérée comme un garçon manqué aimant la bagarre. Son père, sensible à l’émancipation féminine, a laissé grandir Rosa avec une certaine liberté.

Elle ne se mariera pas et n’aura pas d’enfants mais, en 1837, son père reçoit la commande du portrait d’une jeune fille dont les parents craignent sa disparition à cause d’une santé fragile. Elle s’appelle Nathalie Micas et la rencontre entre les deux femmes va bouleverser leur vie. Elles nouent des liens très forts, décident progressivement de travailler puis de vivre ensemble jusqu’à la mort de Nathalie en 1889 à l’âge de 65 ans. La mère de Nathalie, Henriette Micas partage la vie des deux femmes et devient la régente de la maison.

Une autre rencontre marque la fin de sa vie, celle d’une portraitiste américaine, Anna Klumpke, qui deviendra sa confidente. Les deux femmes entretiendront une correspondance dès 1889. Elle durera huit ans. En 1897, Anna propose à Rosa de réaliser son portrait et quitte les États-Unis pour Paris. Afin d’achever le tableau La foulaison du blé en Camargue commencé en 1867, Rosa Bonheur sollicite l’aide financière d’Anna qui paye la moitié de la construction d’un atelier. L’artiste souhaite présenter le tableau à l’Exposition universelle de 1900. Malheureusement elle s’éteint le 25 mai 1899. Ses cendres sont déposées au cimetière du Père-Lachaise dans le caveau de la famille Micas.

Anna Klumpke veillera durant tout le reste de sa vie à faire respecter la mémoire de Rosa Bonheur dont elle fut la légataire universelle. À sa mort elle sera inhumée près d’elle.

Source

  • Gallica, archives de la Gironde et de la Seine et Marne, vmf patrimoine, wikipédia, le jdc du 27 mars 2021 p. 7
  • Transcripteur Martine NOËL (discussion) 25 avril 2023 à 13:43 (CEST)

Notes et références

Notes


References