Pratiques funéraires

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Les actes de sépultures avant 1793 précisent inhumé(e) dans l’église ou inhumé(e) dans le cimetière. Quelle différence faut-il y voir ?
Il faut simplement y voir une différence de classe sociale car il s’agit, dans les deux cas d’un enterrement religieux. Les seigneurs, bourgeois, membres du clergé et quelquefois des catholiques très dévots et pratiquants et léguant leurs biens à l'église avaient le droit d'être enterrés dans l'église. Pour le curé, c'était une source de revenus appréciable, pour ne pas dire vitale au bon fonctionnement et entretien de son église.

  • L’enterrement dans l’église, qui est essentiellement un fait catholique-romain, est un privilège. Si cette pratique est coutumière, elle est proscrite en cas de peste ou autre maladie extrêmement contagieuse. Les corps y sont enterrés dans l’attente de la résurrection. L’enterrement au cimetière est le sort du commun des mortels mais le cimetière reste lié à l’église.
    Entre le 5e et le 10e siècle tous ceux qui ne peuvent avoir une place dans l’église même, recherchent la proximité avec le lieu sacré de manière à avoir la meilleure part aux prières et à la protection des reliques des saints. Il en résulte une accumulation de tombes à l’immédiate proximité de l’église, celle-ci, souvent étroite, ne pouvant recevoir tous les morts. Le parvis de l’église a été jusqu’au 11e siècle le lieu d’inhumation de certains grands personnages, qui, par humilité ont renoncé à être enterrés à l’intérieur de l’église. Au 13e siècle et par la suite, cet emplacement est réservé aux architectes de l’église. Les places les plus proches du chœur sont les plus chères. Elles sont donc réservées aux personnes ayant une certaine aisance financière. Les familles achètent un caveau à un emplacement précis. Leurs enfants et descendants, dans leur testament, élisent leur sépulture dans la tombe où sont enterrés leurs prédécesseurs, parfois en précisant l’emplacement à l’intérieur de l’église. Les corps sont enterrés sous les dalles du pavement de l’église, dalles soulevées à l’occasion de l’enterrement. Des chapelles latérales « de famille » existaient dans certaines églises paroissiales et recevaient aussi des corps. Cela concernait surtout les familles nobles ou bienfaitrices de la paroisse. Ces chapelles étaient parfois dédiées à un saint protecteur. L’ornement de celles-ci reflétait la gloire et la richesse des familles.
  • La sépulture dans les églises a suivi une évolution dans le temps qui coïncide avec celle de l’urbanisation des cimetières. Rare aux temps anciens, elle est très répandue au Moyen Âge et aux temps modernes, recule entre 1700 et 1750, devient exceptionnelle à partir de 1776 et tend à disparaître depuis l’édition du code de Droit Canonique en 1918.
  • Le cimetière étant terre sainte, il était logique, sous l’Ancien Régime et voire jusqu’en 1904, que tous ceux qui n’étaient pas morts dans la communion de l’église n’y avaient pas accès. En étaient notamment exclus les comédiens, les enfants morts sans avoir été baptisés mais qui sont néanmoins enterrés dans un endroit réservé, les suicidés, ceux qui n’ont pas fait leurs Pâques, ceux qui meurent dans les tournois et les duels, les usuriers publics. Aux 12e et 13e siècles les excommuniés, les hérétiques et fauteurs d’hérésie (dans le Nord, par exemple, les hérétiques notoires avaient interdiction d'être enterrés dans le cimetière de la commune et devaient être enterrés, soit dans leur grange, ou, au mieux, dans leur jardin), les apostats, les schismatiques, les intestats. Ces derniers n’allant pas sans créer des abus.
  • Avant 1750, le cimetière est terre d’église et appartient aux paroisses. Il est situé au milieu de la ville. Le nombre de cadavre et les problèmes liés à leur décomposition rendent cette pratique de moins en moins supportable et conduisent les autorités à interdire quasiment pour tout le monde l’inhumation dans l’église, puis à déplacer le cimetière hors du périmètre de celle-ci, souvent à l’extérieur de l’agglomération.
    Après l’an 12 il appartient, sauf exception, aux communes, est clôturé et repoussé hors de la ville. Tout un chacun a le droit d’y être enterré et la pratique de l’inhumation dans l’église a quasiment disparu pour ne plus jamais exister.
    L’évolution s’est faite lentement au détriment du pouvoir religieux et au bénéfice du pouvoir civil. L’ordonnance du roi Louis XVI du 10 mars 1776 limite le droit d’enterrement dans les églises, exige la construction de caveaux, transfère les droits des personnes pouvant être enterrées dans les églises conventuelles de l’église au cloître, exige que les personnes qui sont en droit d’être enterrées dans les églises paroissiales puissent choisir leur place au cimetière, fixe le statut des religieux... Elle confie aux municipalités l’acquisition des terrains ce qui n’est pas sans créer des problèmes financiers.
    Malgré cette ordonnance qui fut plus ou moins bien appliquée, le cimetière demeure terre d’église. La Révolution poursuivra l’œuvre de laïcisation. Elle est la conséquence de la vente de biens nationaux qui met les biens ecclésiastiques à la disposition de la nation. L’article 1er du décret du 13 brumaire an 2 signifie que l’actif des églises fera partie du domaine national.
    Actuellement le cimetière est cimetière municipal et c’est la base de la loi du 23 prairial an 12 (12 juin 1804).
    L’article 2 de prairial prévoit que les lieux de sépultures doivent désormais être situés à une distance d’au moins 35 à 40 mètres de l’enceinte des villes et des bourgs. Il est conseillé de choisir des terrains élevés et exposés au nord. Le changement de lieu entraîne la désaffectation complète des cimetières urbains. De nombreuses paroisses ont encore, de nos jours, leur cimetière autour de l’église.

Sources :
Réponses de colistiers de la liste GenNièvre à une question posée sur le sujet vocabulaire.
L’évolution des cimetières de Daniel Ligou.

Martine NOËL (discussion) 23 juillet 2018 à 15:10 (CEST)