Enfant de 1956 à Courcelles

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Septembre 1956

Mes parents sont affectés à la rentrée scolaire dans une école de campagne située en plein champ, dans le Nivernais, au pied du massif du Morvan, à égale distance du bourg de Courcelles et de Chivres. Mon père raconte qu'un grimoire qu'il avait découvert montrait qu'on avait ainsi tranché au moment de décider de la construction de l'école à la fin du XIXème siècle. Je le cite : "l'avantage de la pleine campagne c'est que chantaient dans notre cour les faisans descendus du coteau tout proche et que le parfum de la reine des près de la prairie où coulait la paisible Sainte Eugénie se mêlait aux senteurs du gros tilleul dans lequel bourdonnaient les abeilles" Courcelles est une commune qui compte 231 habitants au recensement de 1954. Le maire est depuis 1950, M. Louis François agriculteur. Ma mère enseigne aux 21 élèves de la classe des petits, de la classe enfantine aux CE1. Mon père enseigne dans la classe des 21 grands du CE2 à la classe de fin d’études, qui prépare au certificat d’études primaires. Ils sont logés sur place, dans le logement de fonction de l'école, qui ne possède pas l'eau courante. La maitrise de la fertilité n’est pas une chose facile pour les couples. Le débat sur le contrôle des naissances n’en est qu’à ses débuts. La contraception est alors interdite par la loi. C’est donc tout naturellement que je nais 9 mois après la date du mariage, le 22 décembre 1956.

L’histoire de ma naissance est une aventure. Il faut imaginer que mes parents ne possédaient qu’un scooter et un vélo leur avait été prêté.

La cuisinière ronfle bourrée de bûches en cette nuit du 21 décembre 1956. C'est le dernier jour de classe avant les vacances de Noël. Ma mère se plaint de ses premières contractions dans la nuit. Il fait nuit très tôt en décembre dans le Nivernais. Il reste à imaginer une époque sans téléphone. Il faut alerter les voisins situés au village de Courcelles à 2 kilomètres qui sont les seuls à posséder une voiture, susceptible d’emmener ma mère à la maternité de Clamecy à 15 km. A cette époque, on n’accouche plus à domicile. Mon père s’élance donc sur la neige sur un vélo, en pleine nuit, pour aller téléphoner depuis la cabine téléphonique du café du village. Le café est fermé et il doit taper à la fenêtre pour réveiller la propriétaire. La clinique de Clamecy est informée de l’arrivée de ma mère.

M. Perruchet, Colonel à la retraite, et animateur de l’Amicale créée autour de l’école, est préposé au convoyage dans sa vielle voiture Hotchkiss aux énormes gardes boues. Il s’est entrainé depuis quelques jours à la faire tourner à vide pour qu’au signal, le chauffeur et le véhicule soient opérationnels. Il s’installe au volant de sa Hotchkiss. Son épouse, Madame Perruchet va se charger pour la journée des 42 élèves de l’école.

Il part récupérer ma mère à l’école et emmène le couple sur la route de Clamecy. Il fait froid. La route est enneigée. La voiture s’arrête sur le chemin. Ma mère s’imagine devoir accoucher dans la voiture. Le véhicule repart et amène le couple jusqu’à la maternité. Ma naissance à 11h50, le 22 décembre 1956 se précipite dès l’arrivée dans ce lieu moins hostile. C’est le Docteur Barbier qui procède à l’accouchement. Il deviendra maire de la ville de Clamecy puis sénateur de la Nièvre.

27 Décembre 1956 : retour à la maison-école

Pendant le séjour à la clinique, et le congé de maternité, faute de remplaçant, mon père, revêtu de sa blouse grise en coton, rassemble les 2 classes allant de la classe enfantine à la classe de fin d’études. Dans la journée, je suis installée dans la cuisine du logement de fonction, la pièce la plus chaude. La porte donne sur la classe de ma mère. Une jeune fille me garde mais ma mère vient régulièrement surveiller son bébé.

L’eau courante n’est pas installée dans le logement de fonction de mes parents instituteurs. Il faut aller chercher l’eau à la pompe. Elle est très froide, voire glacée. Elle est réchauffée au feu de la cuisinière à bois avant d’être versée dans la cuvette en plastique

En guise de conclusion provisoire ...

J'ai vécu mes 3 premières années dans l'école de Courcelles, au milieu des champs, dans cette nature préservée et reculée du Morvan. C'était une autre époque. J'en garde le souvenir d'un espace protecteur, paisible, un amour de la campagne, un sentiment de plénitude. On est marqué à tout jamais par sa petite enfance.


Une chronique plus complète, consacrée à l'année 1956, agrémentée de photos et d'images est en ligne à cette adresse http://histoirefamilles.blogspot.fr/2014/01/je-suis-une-enfant-de-1956.html

Véronique Battut a autorisé GenNièvre à reproduire la partie consacrée à Courcelles.

--Patrick Raynal 25 janvier 2014 à 20:15 (CET)