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Jean-Baptiste Rémi de PERCY, ancien abbé de Cervon: 1807. Décédé, desservant de Dun les Places, le 27 mai 1823 à l'âge de soixante-six ans.
Jean-Baptiste Rémi de PERCY, ancien abbé de Cervon: 1807. Décédé, desservant de Dun les Places, le 27 mai 1823 à l'âge de soixante-six ans
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Affaires au 18ème siècle
 
1706 - Nescambiouit, prince des Abenakis, scalpeur sanguinaire?
En 1706, un fait divers violent survient dans une petite ville du Nivernais et met en scène deux étrangers. Ces deux hommes sont sujets du roi de France. Ils ne sont donc pas étrangers au sens moderne du mot. Mais ils sont étrangers parce qu'ils viennent du Nouveau-Monde. L'un des deux hommes est un chef indien, aux mœurs et à la réputation étranges. Il se nomme Nescambiouit. Ce que
 
 
 
Affaires au 18ème siècle
 
1706 - Nescambiouit, prince des Abenakis, scalpeur sanguinaire?
En 1706, un fait divers violent survient dans une petite ville du Nivernais et met en scène deux étrangers. Ces deux hommes sont sujets du roi de France. Ils ne sont donc pas étrangers au sens moderne du mot. Mais ils sont étrangers parce qu'ils viennent du Nouveau-Monde. L'un des deux hommes est un chef indien, aux mœurs et à la réputation étranges. Il se nomme Nescambiouit. Ce que nous pouvons savoir de la vie de cet Indien est un véritable puzzle composé de brèves mentions dans les courriers du Ministère de la Marine et dans les archives du gouverneur du Québec, de plus rares témoignages de ses contemporains, collectés par le Père Charlevoix, premier historien du Canada, et d'allusions imprécises du Père Le Sueur, curé des Abénakis de la mission Saint-François. Son entrevue avec le Roi-Soleil a suscité une polémique chez les érudits canadiens des deux siècles suivants.
A propos de Nescambiouit, chef Abénaki fidèle à la France, diplomate habile et redoutable coupeur de scalps, se croise tout un faisceau de jugements de valeur, allant des louanges à la méfiance, de l'admiration à l'indignation et au mépris.
Nescambiouit n'a évidemment laissé aucun témoignage écrit de sa vie ; les Indiens Abénakis du Québec et des Etats-Unis, qui ont récemment organisé plusieurs musées, des centres culturels et revendiquent fièrement leur passé, leurs mœurs et leur culture, ne disposent sur ce chef et sur ses contemporains que des renseignements que leur ont transmis les prêtres et les historiens blancs.
C'est cet étrange allié de Louis XIV, ce redoutable scalpeur d'Anglais, que nous allons tenter de présenter dans un premier temps.
Deux générations après la disparition de Nescambiouit, le marquis de Saint-Lambert a fait d'un vieux chef indien le héros d'un conte intitulé précisément L'Abénaki. Conforme au mythe du bon sauvage, l'Indien est généreux, doux, patient ; il s'exprime en termes poétiques, il donne une leçon de grandeur d'âme aux Européens.
Il existe peut-être un trait d'union entre le redoutable Nescambiouit et le bon vieillard du conte : c'est l'ambiguïté de leurs rapports avec les envahisseurs européens, ennemis, otages, alliés, protecteurs, frères de sang et voleurs de terres.
1. Une rixe dans une auberge.
Le 14 mai 1706, une bagarre éclate à l'auberge du Lion d'Or, faubourg de Moulins, à Saint-Pierre-le-Moûtier. C'est une affaire bien banale dans cette auberge qui reçoit régulièrement des voyageurs du carrosse de Paris ; et l'hôte, Jean Rat, semble être coutumier des violences d'après les dossiers des affaires criminelles du bailliage.
Ce jour-là, il y a deux étrangers, venus d'outre-mer : un chef indien abénaki et son guide, « Jacques Testard, écuyer, seigneur de Montigny, natif de Montréal au Canada, âgé de 44 ans, capitaine de la Compagnie du Détachement de la Plaine dans ledit pays du Canada. »
Que font-ils dans l'auberge de Jean Rat ?
Jacques Testard est en France depuis plusieurs mois. Sa mission consiste à escorter le chef abénaki. Après avoir été reçus à la Cour, les deux hommes visitent le pays. Ils ont pris les eaux à Bourbon-Lancy et bu du lait d'ânesse. « Ils prirent en la ville de Moulins la voiture de carrosse de Paris pour se rendre à la cour et y recevoir de nouveaux ordres pour se rendre à la diligence de La Rochelle afin de retourner en Canada(1). » Le postillon Claude Bourgeois, habitué de la ligne Moulins-Paris, les a fait descendre au Lion d'Or, l'étape de ce jour. Jean Rat leur a réservé sa meilleure chambre.
Testard a commandé des repas à l'hôtesse et il lui a demandé s'il devait payer « par tête ou par pièce ». La femme Rat leur a préparé des soupers à vingt-cinq sols chacun. Au moment de payer, Testard conteste les comptes de l'hôtesse : le chef des Abénakis, Testard et un jeune homme rencontré dans la diligence ont bu plus que de raison « quatre bouteilles d'extraordinaire », ce qui augmente la facture. Mais Testard s'en tient aux vingt-cinq sols par repas...
Le chef indien doit rester imperturbable et ignorer ces obscurs calculs. A moins qu'il n'ait été endormi par l'excès de vin. Testard, lui, est furibond. Il "descend fort en colère", insulte la femme Rat et s'en prend à l'hôte. Il le traite de gueux et jean-foutre, le saisit à la chemise, dont il déchire une manche, le renverse par terre, le traîne jusqu'à la cheminée, il lui assène un coup de poing et deux coups de bâton. Et, sans doute pour montrer qu'il connaît bien les mœurs indiennes, Jacques Testard arrache une pleine touffe de cheveux du crâne du malheureux aubergiste.
Au bruit, tous les voisins accourent. Le curé Antoine Dessouches calme l'officier. Le couvreur Pierre Durin et le postillon soignent Jean Rat qui est « défiguré » selon leur témoignage. M. Gilbert Meuré, capitaine de bourgeoisie, arrête Testard et le conduit en prison. Le chef abénaki suit son mentor sans réagir. Heureusement pour les habitants de la petite ville...
Le capitaine Testard et son ami ne restent qu'une seule nuit à Saint-Pierre-le-Moûtier. Le lieutenant criminel a fait immédiatement prévenir M. d'Ableiges, l'intendant en résidence à Moulins. La réponse est la suivante : « J'ai receu, Messieurs, les informations que vous avez faites contre Monsieur de Monsigny [sic] et l'interrogatoire par lui rendu. La querelle m'a paru estre provenue d'une très légère cause. Il est à propos, pour le service du roy, que vous élargissiez incessamment cet officier, parce qu'il est nécessaire auprès du chef des Abénaquys françois qui doit se rendre à Paris pour, de là, aller s'embarquer à La Rochelle. Je suis, Messieurs, vostre très humble et obéissant serviteur. D'Ableiges. Je luy mande de donner 20 L à cet hoste(2). »
2. Nos fidèles alliés abénakis et leurs chefs.
Les deux hommes reprennent leur périple. A Versailles, Louis XIV reçoit le Prince des Abénaquys. Celui-ci représente une peuplade lointaine, peu connue, mais fort utile pour aider les troupes françaises en Nouvelle-France. En effet, face aux Anglais de Nouvelle-Angleterre, les colons canadiens français et les rares régiments qui les défendent sont dans une situation d'infériorité alarmante. Les combats déclenchés depuis 1693, et relancés par la Guerre de Succession d'Espagne, ont montré aux gouverneurs du Canada (Frontenac puis Vaudreuil) que les supplétifs indiens sont indispensables.
 
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Pierre VOLUT mai 2001.
(1) Interrogatoire de Jacques Testard. Procédures criminelles du Présidial de Saint-Pierre-le-Moûtier, cote 1 B 91, Archives Départementales de la Nièvre. Autres renseignements fournis par le Dictionnaire biographique du Canada, Les Presses de l'Université Laval et University of Toronto, 1969, volume II, p. 653.
(2) Lettre de l'Intendant M. d'Ableiges, ibidem.

Version du 2 avril 2020 à 15:24

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Jean-Baptiste Rémi de PERCY, ancien abbé de Cervon: 1807. Décédé, desservant de Dun les Places, le 27 mai 1823 à l'âge de soixante-six ans


Affaires au 18ème siècle

1706 - Nescambiouit, prince des Abenakis, scalpeur sanguinaire? En 1706, un fait divers violent survient dans une petite ville du Nivernais et met en scène deux étrangers. Ces deux hommes sont sujets du roi de France. Ils ne sont donc pas étrangers au sens moderne du mot. Mais ils sont étrangers parce qu'ils viennent du Nouveau-Monde. L'un des deux hommes est un chef indien, aux mœurs et à la réputation étranges. Il se nomme Nescambiouit. Ce que


Affaires au 18ème siècle

1706 - Nescambiouit, prince des Abenakis, scalpeur sanguinaire? En 1706, un fait divers violent survient dans une petite ville du Nivernais et met en scène deux étrangers. Ces deux hommes sont sujets du roi de France. Ils ne sont donc pas étrangers au sens moderne du mot. Mais ils sont étrangers parce qu'ils viennent du Nouveau-Monde. L'un des deux hommes est un chef indien, aux mœurs et à la réputation étranges. Il se nomme Nescambiouit. Ce que nous pouvons savoir de la vie de cet Indien est un véritable puzzle composé de brèves mentions dans les courriers du Ministère de la Marine et dans les archives du gouverneur du Québec, de plus rares témoignages de ses contemporains, collectés par le Père Charlevoix, premier historien du Canada, et d'allusions imprécises du Père Le Sueur, curé des Abénakis de la mission Saint-François. Son entrevue avec le Roi-Soleil a suscité une polémique chez les érudits canadiens des deux siècles suivants. A propos de Nescambiouit, chef Abénaki fidèle à la France, diplomate habile et redoutable coupeur de scalps, se croise tout un faisceau de jugements de valeur, allant des louanges à la méfiance, de l'admiration à l'indignation et au mépris. Nescambiouit n'a évidemment laissé aucun témoignage écrit de sa vie ; les Indiens Abénakis du Québec et des Etats-Unis, qui ont récemment organisé plusieurs musées, des centres culturels et revendiquent fièrement leur passé, leurs mœurs et leur culture, ne disposent sur ce chef et sur ses contemporains que des renseignements que leur ont transmis les prêtres et les historiens blancs. C'est cet étrange allié de Louis XIV, ce redoutable scalpeur d'Anglais, que nous allons tenter de présenter dans un premier temps. Deux générations après la disparition de Nescambiouit, le marquis de Saint-Lambert a fait d'un vieux chef indien le héros d'un conte intitulé précisément L'Abénaki. Conforme au mythe du bon sauvage, l'Indien est généreux, doux, patient ; il s'exprime en termes poétiques, il donne une leçon de grandeur d'âme aux Européens. Il existe peut-être un trait d'union entre le redoutable Nescambiouit et le bon vieillard du conte : c'est l'ambiguïté de leurs rapports avec les envahisseurs européens, ennemis, otages, alliés, protecteurs, frères de sang et voleurs de terres. 1. Une rixe dans une auberge. Le 14 mai 1706, une bagarre éclate à l'auberge du Lion d'Or, faubourg de Moulins, à Saint-Pierre-le-Moûtier. C'est une affaire bien banale dans cette auberge qui reçoit régulièrement des voyageurs du carrosse de Paris ; et l'hôte, Jean Rat, semble être coutumier des violences d'après les dossiers des affaires criminelles du bailliage. Ce jour-là, il y a deux étrangers, venus d'outre-mer : un chef indien abénaki et son guide, « Jacques Testard, écuyer, seigneur de Montigny, natif de Montréal au Canada, âgé de 44 ans, capitaine de la Compagnie du Détachement de la Plaine dans ledit pays du Canada. » Que font-ils dans l'auberge de Jean Rat ? Jacques Testard est en France depuis plusieurs mois. Sa mission consiste à escorter le chef abénaki. Après avoir été reçus à la Cour, les deux hommes visitent le pays. Ils ont pris les eaux à Bourbon-Lancy et bu du lait d'ânesse. « Ils prirent en la ville de Moulins la voiture de carrosse de Paris pour se rendre à la cour et y recevoir de nouveaux ordres pour se rendre à la diligence de La Rochelle afin de retourner en Canada(1). » Le postillon Claude Bourgeois, habitué de la ligne Moulins-Paris, les a fait descendre au Lion d'Or, l'étape de ce jour. Jean Rat leur a réservé sa meilleure chambre. Testard a commandé des repas à l'hôtesse et il lui a demandé s'il devait payer « par tête ou par pièce ». La femme Rat leur a préparé des soupers à vingt-cinq sols chacun. Au moment de payer, Testard conteste les comptes de l'hôtesse : le chef des Abénakis, Testard et un jeune homme rencontré dans la diligence ont bu plus que de raison « quatre bouteilles d'extraordinaire », ce qui augmente la facture. Mais Testard s'en tient aux vingt-cinq sols par repas... Le chef indien doit rester imperturbable et ignorer ces obscurs calculs. A moins qu'il n'ait été endormi par l'excès de vin. Testard, lui, est furibond. Il "descend fort en colère", insulte la femme Rat et s'en prend à l'hôte. Il le traite de gueux et jean-foutre, le saisit à la chemise, dont il déchire une manche, le renverse par terre, le traîne jusqu'à la cheminée, il lui assène un coup de poing et deux coups de bâton. Et, sans doute pour montrer qu'il connaît bien les mœurs indiennes, Jacques Testard arrache une pleine touffe de cheveux du crâne du malheureux aubergiste. Au bruit, tous les voisins accourent. Le curé Antoine Dessouches calme l'officier. Le couvreur Pierre Durin et le postillon soignent Jean Rat qui est « défiguré » selon leur témoignage. M. Gilbert Meuré, capitaine de bourgeoisie, arrête Testard et le conduit en prison. Le chef abénaki suit son mentor sans réagir. Heureusement pour les habitants de la petite ville... Le capitaine Testard et son ami ne restent qu'une seule nuit à Saint-Pierre-le-Moûtier. Le lieutenant criminel a fait immédiatement prévenir M. d'Ableiges, l'intendant en résidence à Moulins. La réponse est la suivante : « J'ai receu, Messieurs, les informations que vous avez faites contre Monsieur de Monsigny [sic] et l'interrogatoire par lui rendu. La querelle m'a paru estre provenue d'une très légère cause. Il est à propos, pour le service du roy, que vous élargissiez incessamment cet officier, parce qu'il est nécessaire auprès du chef des Abénaquys françois qui doit se rendre à Paris pour, de là, aller s'embarquer à La Rochelle. Je suis, Messieurs, vostre très humble et obéissant serviteur. D'Ableiges. Je luy mande de donner 20 L à cet hoste(2). » 2. Nos fidèles alliés abénakis et leurs chefs. Les deux hommes reprennent leur périple. A Versailles, Louis XIV reçoit le Prince des Abénaquys. Celui-ci représente une peuplade lointaine, peu connue, mais fort utile pour aider les troupes françaises en Nouvelle-France. En effet, face aux Anglais de Nouvelle-Angleterre, les colons canadiens français et les rares régiments qui les défendent sont dans une situation d'infériorité alarmante. Les combats déclenchés depuis 1693, et relancés par la Guerre de Succession d'Espagne, ont montré aux gouverneurs du Canada (Frontenac puis Vaudreuil) que les supplétifs indiens sont indispensables.

Pour accéder à la suite du texte cliquer sur ce lien « pages et dérapages » Pierre VOLUT mai 2001. (1) Interrogatoire de Jacques Testard. Procédures criminelles du Présidial de Saint-Pierre-le-Moûtier, cote 1 B 91, Archives Départementales de la Nièvre. Autres renseignements fournis par le Dictionnaire biographique du Canada, Les Presses de l'Université Laval et University of Toronto, 1969, volume II, p. 653. (2) Lettre de l'Intendant M. d'Ableiges, ibidem.