Synthèse générale

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  • Globalement, de par leurs origines, ces procès-verbaux sont certainement des indicateurs fidèles de l’idéologie dominante et des préoccupations des notables de la Nièvre en cette période immédiatement postrévolutionnaire, bien résolue à créer une société nouvelle corrigeant les erreurs de la précédente.
  • Ces procès-verbaux témoignent aussi des tensions et des inquiétudes de cette première moitié du 19ème siècle particulièrement nocive pour les plus démunis. Et c’est précisément les plus vulnérables des plus démunis qui alimenteront les inquiétudes(1).
  • Sacralisée par la Révolution et confiée à la seule Nation qui, théoriquement lui assure une bienveillance sans faille, la sauvegarde des enfants trouvés se heurtera assez rapidement au caractère dissuasif de la dépense qui en résulte. Perçue alors comme un véritable fléau, elle est d’autant plus redoutée et redoutable qu’elle menace la priorité du moment : le développement économique de la région.
  • La libéralisation des activités commerciales et industrielles majore la misère des familles ce qui en soi, majore le nombre d’abandons d’enfants. Malgré l’emphase des discours officiels qui leur sont réservés, ces derniers ne peuvent pas échapper au jugement péjoratif réservé à la pauvreté, aggravée en ce qui les concerne par les stigmates de leurs origines, pour peu que la maman soit célibataire. Ce qui est fréquent(2).
  • Pour les notables locaux, qui in fine décident de leurs conditions de survie, en déterminant le montant du budget affecté à leur prise en charge, les ressources accordées seront toujours contraintes, témoignant par-là que les pauvres coûtent toujours trop chers.
    « L’état se libère donc de son devoir d’assistance et laisse aux communes la charge de l’indispensable solidarité avec les pauvres. Ceci en accord avec la société libérale qui se constitue et qui considère que la mission de l’état est avant tout de maintenir l’ordre et non de secourir les miséreux(3) ».
  • Dans ce contexte, l’Hospice devenu la plaque tournante départementale de l’enfance en déshérence, s’épuisera en vain pour faire valoir le besoin de financement qui en résulte, afin de préserver son propre capital constitué grâce à des dons. Se considérant le garant de ce « patrimoine des pauvres » l’Hospice revendique le droit de le préserver en faveur « des vieillards indigents et des pauvres malades(4) » comme étant sa véritable vocation.
  • Non seulement les budgets accordés ne répondent pas aux besoins ressentis mais, épisodiquement, les administrations en charge des paiements s’en dispensent sans être particulièrement inquiétés à ce propos. Cela vaut pour l’Etat et pour les communes. Même si cette attitude s’explique par une situation financière globalement exsangue, elle ne permet pas d’occulter les conséquences qui en résultent sur l’espérance de vie des enfants, elle aussi globalement exsangue.
  • Restent les nourrices dont les salaires subissent les mêmes velléités restrictives que celles réservées aux enfants : non seulement ils demeurent dans une fourchette particulièrement modeste mais parfois leur versement est différé, sur un long terme.
    Contre toute attente, cette situation s’inversera d’elle-même, grâce ou à cause de la concurrence parisienne. En effet, du fait de salaires plus attractifs associés à divers avantages l’Assistance Publique de Paris recrute aisément des nourrices dans la Nièvre aux dépens des besoins locaux.
    A son grand dam, le Conseil Général sera ainsi contraint d’augmenter régulièrement ses propres rétributions, efforts d’autant plus décevants qu’ils sont impuissants à rivaliser avec la progression constante des tarifs parisiens.
  • Cette situation chaotique et préjudiciable aux enfants indigents va toutefois amorcer une évolution positive au début de la seconde moitié du siècle, avec l’attribution d’aides financières aux mamans indigentes et la mise en place d’un Inspecteur de l’Assistance Publique, chargé de la surveillance des enfants. Grâce à ses contrôles in situ et les rapports qui en résultent, ce dernier deviendra une source d’informations concrètes et suivies, autorisant des bilans comparatifs avec l’année précédente. En proposant des chiffres et des faits, ces bilans ont certainement été riches d’enseignement pour les autorités politiques et favorisé des initiatives plus pertinentes.
    Des décisions sont également prises en faveur des médecins pour obtenir un meilleur suivi des enfants, prélude à l’influence qu’ils auront par la suite au fur et à mesure que la science clinique se constituera.

(1) Cité par Philippe SASSIER. Article intitulé : « De la notion de pauvreté à celle de l’exclusion » page 23. Catalogue d’exposition intitulé : « Depuis 100 ans, la Société, l’Hôpital et les Pauvres ». Assistance Publique / Hôpitaux de Paris. Edition DOIN 1997.
(2) « De l’Assistance en Province – Cinq années de pratique ». de M.A. MAGNITOT, Préfet de la Nièvre. Edition 1860. Voir notamment pages 59/60.
(3) Cité par Marie José IMBAULT-HUART. Article intitulé « Médicalisation et fonction sociale de l’Hôpital : convergences et contradictions », page 60 de l’ouvrage précédemment cité en (1).
(4) AD 58. Cote H Dépôt 3G


Texte communiqué par Arlette Nicoloso mis en page par Martine NOËL le 27 juin 2017