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*Maximilien Bonnin est mort à Steenstraat le 16 mai 1915. Depuis trois semaines, de violents combats se livraient sur cette zone.<br>
*Maximilien Bonnin est mort à Steenstraat le 16 mai 1915. Depuis trois semaines, de violents combats se livraient sur cette zone.<br>
*Nous avons, grâce au commandant Willy Breton (''Les Combats de Steenstraat''. Ed. Berger), une description particulièrement émouvante, dans sa simplicité, de l'attaque allemande sur le front belge ; elle émane d'un grenadier belge qui se trouvait à Steenstraat même :<br>
*Nous avons, grâce au commandant Willy Breton (''Les Combats de Steenstraat''. Ed. Berger), une description particulièrement émouvante, dans sa simplicité, de l'attaque allemande sur le front belge ; elle émane d'un grenadier belge qui se trouvait à Steenstraat même :<br>
:« ''J'étais aux tranchées quand commença l'attaque allemande du 22 avril.<br> Ma compagnie occupait l'extrémité du secteur tenu par notre armée. Entre le front belge et le front français il existait un intervalle d'environ 200 mètres où s'élevaient une dizaine de maisons du hameau de Steenstraat, notamment une petite brasserie où nous avions installé un poste d'écoute. Nous étions là huit hommes et un caporal. Obligés de veiller attentivement pendant la nuit, nous pouvions nous reposer durant le jour. Nous devions être relevés le soir même.<br> Il faisait une journée de printemps radieuse ; un léger vent du nord soufflait. Tout était si calme que nous ne pensions pour ainsi dire plus à la guerre quand, soudain, vers 17h30 de l'après-midi, nous vîmes une épaisse fumée s'élever au-dessus des tranchées allemandes en face de nous.<br> La surprise et la curiosité nous clouaient au sol.<br> Nul de nous n'aurait pu se douter, en ce moment, de quoi il s'agissait.<br> Comme le nuage de fumée s'épaississait, nous crûmes que les abris de la tranchée allemande avaient pris feu.<br> Le nuage pourtant se dirigeait lentement vers nous, mais, sous l'action du vent, nous le vîmes dériver vers la droite au-dessus des lignes françaises. L'extrémité de la couche de vapeur nous atteignit seule ; elle était moins épaisse, mais dégageait une si singulière odeur et me saisit à tel point, à la gorge, que je crus un moment que j'allais étouffer… brusquement, j'entendis crier autour de moi : « Une attaque, les Boches sont là... »<br> Je regardai dans la direction d'où provenaient ces cris, c'étaient des soldats français qui occupaient les environs du pont de Steenstraat et couraient vers nos tranchées. Plusieurs tombèrent en chemin. A notre caporal, qui les interpellait pour savoir ce qui se passait, j'entendis qu'ils répondaient : « Nous sommes empoisonnés. »<br> Nous reçûmes l'ordre de quitter le poste d'écoute pour rejoindre la tranchée de première ligne. Dans celle-ci tous mes camarades, muets mais étonnants de calme, restaient immobiles, les yeux braqués sur la ligne allemande, le fusil prêt à tirer.<br> Le commandant et le lieutenant, qui avaient sorti leur revolver de sa gaine, parcouraient rapidement la tranchée, allant de l'un à l'autre, s'assurant que chacun était à son poste. J'entends encore la voix du commandant : « Allons, mes braves, voici le moment de montrer aux Boches que nous sommes là et que les Belges ne reculeront pas ; je compte sur vous et que chacun se défende jusqu'à la mort. »<br> Entre temps le nuage de fumée autour de nous s'était presque dissipé. Nous aperçûmes alors 4 ou 5 Allemands qui se dirigeaient vers le pont. Les fusils partirent tout seuls, 2 Boches tombèrent.<br> A côté de moi, un homme cria : « Ce sont peut-être des Français... » Mais non, là-bas, en avant de notre droite, des rangs entiers d'ennemis, baïonnette au fusil, s'avançaient derrière le nuage de fumée ; ils avaient atteint la ligne française. Je vis distinctement des officiers allemands frapper leurs hommes à coup de plat de sabre pour les faire marcher plus vite. Un feu d'enfer partit de notre tranchée, nous tirions à toute vitesse ; le canon de mon fusil me brûlait les doigts, mais ces damnés Boches avançaient toujours, dépassant les lignes françaises.<br> Il pouvait être environ 19 heures, quand craignant d'être pris en flanc, notre commandant donna l'ordre à la moitié de la compagnie d'élever une barricade à angle droit avec notre tranchée''. »<br> (''Cf.'' site Chtimiste).<br><br><small>(1) La prolongation du service militaire était demandée depuis plusieurs années par l'Etat-Major, afin d'augmenter le contingent. L'Allemagne, plus peuplée que la France, disposait d'une armée plus nombreuse, et les troupes coloniales étaient difficilement mobilisables dans un court délai. A partir du 13 mai 1913, des protestations et des actions antimilitaristes ont été organisées par les syndicats et le parti socialiste. La loi a été votée le 16 juillet suivant.<br> (2) Registre des Délibérations Municipales de Decize, 8 juin 1913, p. 74.<br> (3) R.D.M. de Decize, 30 juin 1913, p. 79.</small><br><br>
:« ''J'étais aux tranchées quand commença l'attaque allemande du 22 avril.<br> Ma compagnie occupait l'extrémité du secteur tenu par notre armée. Entre le front belge et le front français il existait un intervalle d'environ 200 mètres où s'élevaient une dizaine de maisons du hameau de Steenstraat, notamment une petite brasserie où nous avions installé un poste d'écoute. Nous étions là huit hommes et un caporal. Obligés de veiller attentivement pendant la nuit, nous pouvions nous reposer durant le jour. Nous devions être relevés le soir même.<br> Il faisait une journée de printemps radieuse ; un léger vent du nord soufflait. Tout était si calme que nous ne pensions pour ainsi dire plus à la guerre quand, soudain, vers 17h30 de l'après-midi, nous vîmes une épaisse fumée s'élever au-dessus des tranchées allemandes en face de nous.<br> La surprise et la curiosité nous clouaient au sol.<br> Nul de nous n'aurait pu se douter, en ce moment, de quoi il s'agissait.<br> Comme le nuage de fumée s'épaississait, nous crûmes que les abris de la tranchée allemande avaient pris feu.<br> Le nuage pourtant se dirigeait lentement vers nous, mais, sous l'action du vent, nous le vîmes dériver vers la droite au-dessus des lignes françaises. L'extrémité de la couche de vapeur nous atteignit seule ; elle était moins épaisse, mais dégageait une si singulière odeur et me saisit à tel point, à la gorge, que je crus un moment que j'allais étouffer… brusquement, j'entendis crier autour de moi : « Une attaque, les Boches sont là... »<br> Je regardai dans la direction d'où provenaient ces cris, c'étaient des soldats français qui occupaient les environs du pont de Steenstraat et couraient vers nos tranchées. Plusieurs tombèrent en chemin. A notre caporal, qui les interpellait pour savoir ce qui se passait, j'entendis qu'ils répondaient : « Nous sommes empoisonnés. »<br> Nous reçûmes l'ordre de quitter le poste d'écoute pour rejoindre la tranchée de première ligne. Dans celle-ci tous mes camarades, muets mais étonnants de calme, restaient immobiles, les yeux braqués sur la ligne allemande, le fusil prêt à tirer.<br> Le commandant et le lieutenant, qui avaient sorti leur revolver de sa gaine, parcouraient rapidement la tranchée, allant de l'un à l'autre, s'assurant que chacun était à son poste. J'entends encore la voix du commandant : « Allons, mes braves, voici le moment de montrer aux Boches que nous sommes là et que les Belges ne reculeront pas ; je compte sur vous et que chacun se défende jusqu'à la mort. »<br> Entre temps le nuage de fumée autour de nous s'était presque dissipé. Nous aperçûmes alors 4 ou 5 Allemands qui se dirigeaient vers le pont. Les fusils partirent tout seuls, 2 Boches tombèrent.<br> A côté de moi, un homme cria : « Ce sont peut-être des Français... » Mais non, là-bas, en avant de notre droite, des rangs entiers d'ennemis, baïonnette au fusil, s'avançaient derrière le nuage de fumée ; ils avaient atteint la ligne française. Je vis distinctement des officiers allemands frapper leurs hommes à coup de plat de sabre pour les faire marcher plus vite. Un feu d'enfer partit de notre tranchée, nous tirions à toute vitesse ; le canon de mon fusil me brûlait les doigts, mais ces damnés Boches avançaient toujours, dépassant les lignes françaises.<br> Il pouvait être environ 19 heures, quand craignant d'être pris en flanc, notre commandant donna l'ordre à la moitié de la compagnie d'élever une barricade à angle droit avec notre tranchée''. »<br> (''Cf.'' site Chtimiste).<br><br><small>(1) La prolongation du service militaire était demandée depuis plusieurs années par l'Etat-Major, afin d'augmenter le contingent. L'Allemagne, plus peuplée que la France, disposait d'une armée plus nombreuse, et les troupes coloniales étaient difficilement mobilisables dans un court délai. A partir du 13 mai 1913, des protestations et des actions antimilitaristes ont été organisées par les syndicats et le parti socialiste. La loi a été votée le 16 juillet suivant.<br> (2) Registre des Délibérations Municipales de Decize, 8 juin 1913, p. 74.<br> (3) R.D.M. de Decize, 30 juin 1913, p. 79.</small><br>
 
=='''L'attaque meurtrière du Bois en Brosse.'''==
[[Image:Guerre 1914-1918 61.jpg|thumb|300px|]]
*Le 18 juin, deux soldats de [[Fleury sur Loire|<u>Fleury-sur-Loire</u>]], un de [[Decize|<u>Decize</u>]] et un autre de [[Saint Germain Chassenay|<u>Saint-Germain-Chassenay</u>]] sont tués dans la même attaque.<br> La lecture du Journal des Marches et Opérations de leur régiment, le 213<small><sup>e</sup></small> Régiment d'Infanterie, permet de comprendre dans quelles circonstances ils ont vécu leur dernier combat.<br>
*Depuis plusieurs semaines, le 213<small><sup>e</sup></small> R.I. alterne les positions en première ou seconde ligne sur le flanc nord-est du Langenfeldkopf, un petit sommet qui domine la haute vallée de la Thur, dans le sud de l'Alsace, et le cantonnement de repos à Malmerspach.<br> Le 16 juin, plusieurs bataillons de ce régiment de réservistes reviennent au front ; ils prennent position dans les tranchées de seconde ligne, où ils relèvent le 5<small><sup>e</sup></small> bataillon de chasseurs. Une attaque d'envergure est programmée pour le 18 juin.<br>
*Le 18 juin, à 3 h du matin, le 6<small><sup>e</sup></small> bataillon se prépare à avancer, en appui d'une attaque menée par un bataillon de chasseurs à pied dans le secteur du Bois en Brosse. A 6 h 30, les chasseurs sortent des tranchées en avant-garde. A 6 h 55, la charge sonne pour les poilus du 213<small><sup>e</sup></small>.<br> La traversée des fils de fer et l'arrivée sur la tranchée allemande sont réussies lorsque 3 obus allemands de 220 tombent dans les rangs avancés, suivis par plusieurs obus français de 75 mal ajustés. S'ensuit un flottement qui permet une contre-attaque allemande.<br> La progression prévue est annulée. Le régiment a perdu ce jour-là 7 officiers (3 tués, 3 blessés et 1 disparu) et 310 hommes de troupe (95 tués, 61 blessés et 154 disparus). Parmi la liste des tués figurent Alexandre Labrune, matricule 014325 et Annet Morin matricule 018367. Jean Pagneux, matricule 014325 est porté disparu. Léonard Chamorin, matricule 923 a dû mourir de ses blessures le jour-même au cantonnement de Malmerspach. Tous les quatre appartenaient à la 23<small><sup>e</sup></small> compagnie.<br> Cf. J.M.O. Du 213<small><sup>e</sup></small> R.I., juin 1915, pp. 21-26, site Internet mémoiresdeshommes.<br><br>  


Texte de Pierre Volut  http://histoiresdedecize.pagesperso-orange.fr/index.htm et http://lesbleuetsdecizois.blogspot.fr/  mis en page par --[[Utilisateur:Mnoel|Mnoel]] 4 juin 2015 à 15:35 (CEST)
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Version du 5 juin 2015 à 14:13

Guerre 1914-1918 57.jpg

Du pacifisme à la plainte d'un père affligé.

  • La Tribune publie le 9 juin une lettre de Gabriel Bonnin, conseiller municipal socialiste de Decize et redoutable polémiste.
« Monsieur le rédacteur. Mon fils Bonnin Maximilien, soldat de la classe 1915, est tombé sur les champs de bataille, victime de cette guerre affreuse qui ensanglante l'Europe.
Savez-vous comment j'ai appris sa mort ?
La femme d'un enfant assisté que nous avons élevé chez mon père, est allée, jeudi dernier, toucher à la mairie de Decize son allocation. M. le secrétaire de mairie, avec le tact qui caractérise tous ceux dont ce monsieur est le subalterne, a dit à cette personne : « Allez dire à Bonnin que son garçon est mort. » »
  • Avant le déclenchement du conflit, le courant pacifiste et antimilitariste était représenté à Decize par plusieurs élus locaux socialistes. En juin 1913, alors que l'Assemblée Nationale débat de la loi des trois ans(1), des affiches antimilitaristes sont découvertes sur plusieurs murs de la ville.
    Un débat virulent oppose, lors de la séance du conseil municipal du 8 juin, MM. Gaillard et Bonnin d'une part, le maire et les autres conseillers d'autre part. M. Gaillard adresse au maire des paroles sibyllines, qui sont interprétées comme des outrages : « À la veille de l'ouverture de la pêche, une casserole de plus pourra être utilisée(2). »
  • Trois semaines plus tard, au cours d'une autre séance, M. Bonnin reproche au docteur Régnier de l'avoir dénoncé à la Préfecture. Il lui dit : « Vous êtes une casserole et un mouchard ! » M. Gaillard, plus calme, revient sur sa déclaration du 8 juin et nie avoir employé le terme de casserole(3).
  • En août 1914, les querelles se taisent : l'union sacrée regroupe toutes les forces politiques derrière le maire de Decize. MM. Bonnin et Gaillard abandonnent leurs illusions pacifistes devant le danger de l'invasion allemande ; le premier a deux fils sous les drapeaux, le second est mobilisé.
    Quelque temps plus tard, les deux anciens pacifistes sont frappés.
  • Le 16 juillet 1916, M. Demnard « engage le conseil municipal à adresser à M. Bonnin ses regrets et ses vives condoléances pour le sacrifice cruel de son fils au salut de la patrie. » L'élu local veut sans doute répondre à l'article paru l'année précédente.
  • Quant à André Gaillard, il revient du front très gravement malade et il meurt en juin 1917.

Les combats de Steenstraat, les attaques au gaz asphyxiant (ypérite).

Guerre 1914-1918 59.jpg
  • Maximilien Bonnin est mort à Steenstraat le 16 mai 1915. Depuis trois semaines, de violents combats se livraient sur cette zone.
  • Nous avons, grâce au commandant Willy Breton (Les Combats de Steenstraat. Ed. Berger), une description particulièrement émouvante, dans sa simplicité, de l'attaque allemande sur le front belge ; elle émane d'un grenadier belge qui se trouvait à Steenstraat même :
« J'étais aux tranchées quand commença l'attaque allemande du 22 avril.
Ma compagnie occupait l'extrémité du secteur tenu par notre armée. Entre le front belge et le front français il existait un intervalle d'environ 200 mètres où s'élevaient une dizaine de maisons du hameau de Steenstraat, notamment une petite brasserie où nous avions installé un poste d'écoute. Nous étions là huit hommes et un caporal. Obligés de veiller attentivement pendant la nuit, nous pouvions nous reposer durant le jour. Nous devions être relevés le soir même.
Il faisait une journée de printemps radieuse ; un léger vent du nord soufflait. Tout était si calme que nous ne pensions pour ainsi dire plus à la guerre quand, soudain, vers 17h30 de l'après-midi, nous vîmes une épaisse fumée s'élever au-dessus des tranchées allemandes en face de nous.
La surprise et la curiosité nous clouaient au sol.
Nul de nous n'aurait pu se douter, en ce moment, de quoi il s'agissait.
Comme le nuage de fumée s'épaississait, nous crûmes que les abris de la tranchée allemande avaient pris feu.
Le nuage pourtant se dirigeait lentement vers nous, mais, sous l'action du vent, nous le vîmes dériver vers la droite au-dessus des lignes françaises. L'extrémité de la couche de vapeur nous atteignit seule ; elle était moins épaisse, mais dégageait une si singulière odeur et me saisit à tel point, à la gorge, que je crus un moment que j'allais étouffer… brusquement, j'entendis crier autour de moi : « Une attaque, les Boches sont là... »
Je regardai dans la direction d'où provenaient ces cris, c'étaient des soldats français qui occupaient les environs du pont de Steenstraat et couraient vers nos tranchées. Plusieurs tombèrent en chemin. A notre caporal, qui les interpellait pour savoir ce qui se passait, j'entendis qu'ils répondaient : « Nous sommes empoisonnés. »
Nous reçûmes l'ordre de quitter le poste d'écoute pour rejoindre la tranchée de première ligne. Dans celle-ci tous mes camarades, muets mais étonnants de calme, restaient immobiles, les yeux braqués sur la ligne allemande, le fusil prêt à tirer.
Le commandant et le lieutenant, qui avaient sorti leur revolver de sa gaine, parcouraient rapidement la tranchée, allant de l'un à l'autre, s'assurant que chacun était à son poste. J'entends encore la voix du commandant : « Allons, mes braves, voici le moment de montrer aux Boches que nous sommes là et que les Belges ne reculeront pas ; je compte sur vous et que chacun se défende jusqu'à la mort. »
Entre temps le nuage de fumée autour de nous s'était presque dissipé. Nous aperçûmes alors 4 ou 5 Allemands qui se dirigeaient vers le pont. Les fusils partirent tout seuls, 2 Boches tombèrent.
A côté de moi, un homme cria : « Ce sont peut-être des Français... » Mais non, là-bas, en avant de notre droite, des rangs entiers d'ennemis, baïonnette au fusil, s'avançaient derrière le nuage de fumée ; ils avaient atteint la ligne française. Je vis distinctement des officiers allemands frapper leurs hommes à coup de plat de sabre pour les faire marcher plus vite. Un feu d'enfer partit de notre tranchée, nous tirions à toute vitesse ; le canon de mon fusil me brûlait les doigts, mais ces damnés Boches avançaient toujours, dépassant les lignes françaises.
Il pouvait être environ 19 heures, quand craignant d'être pris en flanc, notre commandant donna l'ordre à la moitié de la compagnie d'élever une barricade à angle droit avec notre tranchée
. »
(Cf. site Chtimiste).

(1) La prolongation du service militaire était demandée depuis plusieurs années par l'Etat-Major, afin d'augmenter le contingent. L'Allemagne, plus peuplée que la France, disposait d'une armée plus nombreuse, et les troupes coloniales étaient difficilement mobilisables dans un court délai. A partir du 13 mai 1913, des protestations et des actions antimilitaristes ont été organisées par les syndicats et le parti socialiste. La loi a été votée le 16 juillet suivant.
(2) Registre des Délibérations Municipales de Decize, 8 juin 1913, p. 74.
(3) R.D.M. de Decize, 30 juin 1913, p. 79.

L'attaque meurtrière du Bois en Brosse.

Guerre 1914-1918 61.jpg
  • Le 18 juin, deux soldats de Fleury-sur-Loire, un de Decize et un autre de Saint-Germain-Chassenay sont tués dans la même attaque.
    La lecture du Journal des Marches et Opérations de leur régiment, le 213e Régiment d'Infanterie, permet de comprendre dans quelles circonstances ils ont vécu leur dernier combat.
  • Depuis plusieurs semaines, le 213e R.I. alterne les positions en première ou seconde ligne sur le flanc nord-est du Langenfeldkopf, un petit sommet qui domine la haute vallée de la Thur, dans le sud de l'Alsace, et le cantonnement de repos à Malmerspach.
    Le 16 juin, plusieurs bataillons de ce régiment de réservistes reviennent au front ; ils prennent position dans les tranchées de seconde ligne, où ils relèvent le 5e bataillon de chasseurs. Une attaque d'envergure est programmée pour le 18 juin.
  • Le 18 juin, à 3 h du matin, le 6e bataillon se prépare à avancer, en appui d'une attaque menée par un bataillon de chasseurs à pied dans le secteur du Bois en Brosse. A 6 h 30, les chasseurs sortent des tranchées en avant-garde. A 6 h 55, la charge sonne pour les poilus du 213e.
    La traversée des fils de fer et l'arrivée sur la tranchée allemande sont réussies lorsque 3 obus allemands de 220 tombent dans les rangs avancés, suivis par plusieurs obus français de 75 mal ajustés. S'ensuit un flottement qui permet une contre-attaque allemande.
    La progression prévue est annulée. Le régiment a perdu ce jour-là 7 officiers (3 tués, 3 blessés et 1 disparu) et 310 hommes de troupe (95 tués, 61 blessés et 154 disparus). Parmi la liste des tués figurent Alexandre Labrune, matricule 014325 et Annet Morin matricule 018367. Jean Pagneux, matricule 014325 est porté disparu. Léonard Chamorin, matricule 923 a dû mourir de ses blessures le jour-même au cantonnement de Malmerspach. Tous les quatre appartenaient à la 23e compagnie.
    Cf. J.M.O. Du 213e R.I., juin 1915, pp. 21-26, site Internet mémoiresdeshommes.

Texte de Pierre Volut http://histoiresdedecize.pagesperso-orange.fr/index.htm et http://lesbleuetsdecizois.blogspot.fr/ mis en page par --Mnoel 4 juin 2015 à 15:35 (CEST)