Anciennes monnaies du Nivernais

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  • Émettre de la monnaie est un signe de souveraineté.
  • La monnaie répond à trois fonctions :
• mesurer la valeur des échanges,
• thésauriser (mettre de l’argent de côté),
• faciliter les échanges.
Armes du Nivernais
  • Avant la monétarisation les échanges se faisaient en nature.
  • Le Comté de Nivernais fait partie de l’ancien royaume d’Aquitaine jusqu’au 9ème siècle. Ce n’est qu’à la fin de ce siècle qu’il passe en la possession des ducs de Bourgogne qui en laissent l’administration aux comtes qui relèvent de leur autorité.
    Il est fort probable que le monnayage féodal commençe, au type carolingien, grâce à l’influence des ducs de Bourgogne vers le milieu du 10ème siècle. Les monnaies de Nevers portent ensuite le nom d’un roi Louis, comme type, et il se pourrait qu’il s’agisse du nom de Louis IV d’Outre-Mer, roi carolingien de 936 à 954, ou plus simplement par suite de la continuation d’un type.
  • La monnaie de Nevers a un rayonnement faible et aucun contrôle n’est exercé sur elle.
    Les monnaies « qui comptent » sont celles de Gien. La monnaie des barons de Donzy est frappée dans cette ville.
  • Le comté de Nevers est autonome au sein de la couronne de France puis représente uniquement un titre au 14ème siècle.
    Un atelier monétaire existait à Nevers dès l’époque mérovingienne. Cet atelier semble avoir été peu actif car seules les deux pièces ci-dessous sont connues.
    Le cartulaire(1) de Fontmorigny fait état d’un atelier monétaire aux Montapins.
    Les comtes de Nevers frappaient monnaie à Clamecy.
  • Il existait également des ateliers itinérants et on pouvait voir apparaître sur la monnaie le nom du lieu où la monnaie avait été frappée.

Période mérovingienne (du 5ème siècle au milieu du 8ème siècle)

Cette période est peu riche car elle ne comprend que deux pièces. Deux triens (tiers de sol) ont été trouvés et reconnus comme appartenant à la ville de Nevers. Le premier triens porte la mention NEBERNO CIVI sur une face, BEROALDVS MO. Et les lettres N E (initiales du mot Neberno) à côté d’une croix latine sur l’autre face. Le deuxième triens porte la mention NIVE. NII. Sur une face, ANADLIGIL MONET et les lettres N E comme sur le premier triens.
Les monnaies mérovingiennes portent des noms de rois, ceux-ci relativement assez rares, et des noms d’origine germanique ou latine de monnayers.
Triens n° 1
Triens n° 2

Période carolingienne (seconde moitié du 8ème siècle fin du 10ème siècle)

À partir du règne de Pépin-le-Bref (roi des Francs de 751-768), l'argent est utilisé de manière quasi exclusive pour le monnayage. Le nom du monétaire est remplacé par celui du roi et la tête mérovingienne est remplacée par un monogramme (signature qui réunit plusieurs lettres en un seul dessin ; ci-dessous R.P. et N.E.).

Exemple d'un denier en argent frappé sous le règne de Pépin-le-Bref.
R. P. (Rex Pipinus : roi Pépin)
Monnaie du Nivernais Denier argent Pépin le Bref.jpg
Monnaie du Nivernais Denier Pépin le Bref.jpg
La monnaie de Nevers porte sur l'autre face les lettres N. E. (Nevirnum) réunies en monogramme, surmontées d'un trait et accompagnées de deux points et d'une sorte de croissant montant au-dessous de la lettre N ; le tout entouré d'un grènetis(2).
Jusqu'au règne de Charlemagne (roi des Francs de 768 à 814) , il n'y a que deux monnaies réelles : le denier et l'obole qui valait la moitié du denier. Ses successeurs décident, de leur propre autorité, de nombreux règlements relatifs aux monnaies mais c'est à Charles-le-Chauve (roi des Francs de 843 à 877) que l'art monétaire doit les plus importants. Après l'édit d'Attigny en 854 et celui de Crécy-sur-Oise en 861, l'édit de Pistres (Pîtres, Pistes) en 864 ordonne la refonte générale des monnaies, fixe les empreintes des coins, détermine le rapport du denier avec la livre et limite à dix le nombre des ateliers monétaires.
Charles-le-Chauve, en consacrant l'hérédité des fiefs, crée la féodalité(3). Bien que le roi demeure possesseur du royaume en droit, de fait il ne dispose plus de rien puisque les divers fiefs sont dévolus aux seigneurs qui en portent les titres et jouissent du domaine utile(4)). Le monnayage fait partie de ce domaine. Le roi se trouve ainsi gêné dans son droit de battre monnaie par les prétentions des seigneurs.
+ŊEVERŊIS CIVIT (face 1) +CARLVS IMPAVG (face 2)
+GRATIA D I REX
+NEVERNIS CVITVS
Le premier specimen est au monogramme de Karolus postérieur à celui ci-dessous de par la forme des N qui se rapporte à ceux que porte la monnaie du roi Raoul, duc de Bourgogne de 921 à 923 puis roi des Francs de 923 à 936.
Le deuxième specimen, également au monogramme de Karolus, appartient au monnayage royal et aurait été fabriqué soit par Charles-le-Gros, empereur (884-887), soit avec le nom de Charles-le-Chauve, sous l'un de ses successeurs.

Un denier de Nevers au nom du roi Raoul
+RODVLFVS (face 1) +ŊEVERŊIS CIVIT (face 2)
Rodolfus est accompagné, au centre de la pièce, des lettres du mot REX disposées de manière à former les sigles devenus le type particulier aux monnaies de Nevers.
Les N ressemblent à ceux des pièces précédentes au monogramme de Karolus.
+LVDOVICUS E
+NEVERŊIS CIVT
Pièce frappée au nom de Louis IV antérieure à 1037 et probablement du 10ème siècle. Le 2ème N est semblable à ceux figurant sur la monnaie frappée au nom du roi Raoul.

Monnayage féodal au nom des comtes

La monnaie féodale montre les courants commerciaux contrairement à la monnaie royale.
Les comtes de Nevers frappent peu de monnaie mais frappent une monnaie forte.
Vers le milieu du 12ème siècle ils placent leur nom sur les deniers et les monnayers altèrent à nouveau le type primitif déjà sensiblement dégénéré sur les pièces frappées au nom de Ludovicus.

Guillaume IV de Nevers

Né en 1130, mort en croisades en 1168 ; comte de Nevers, Auxerre et Tonnerre de 1161 à 1168.
+COMES GVLLEAM (face 1) +NIVERNIS CIVITS (face 2)
Cette pièce doit être attribuée à l'un des comtes de Nevers du nom de Guillaume qui étaient au nombre de cinq. Guillaume 1er commence à gouverner le Nivernais en 1040 jusqu'à Guillaume V mort en 1181. L'aspect de la pièce laisse à penser qu'elle date de la moitié du 12ème siècle et qu'elle est au nom de Guillaume IV. Guillaume V est mort jeune et non affranchi de la tutelle de sa mère.
Apparaît pour la première fois sur cette pièce, Nivernis, au lieu de Nevernis. Les N ressemblent à des H.

Pierre de Courtenay

Né vers 1165, comte de Nevers de 1184 à 1199.
+COMES PETRVS (face 1) +NIVERNIS CIVIT (face 2)
Au centre de la pièce de gauche une sorte de faucille qui sera présente sur la plupart des monnaies nivernaises postérieures.
Une charte de Philippe-Auguste datant de 1188 atteste que les monnaies du Nivernais avaient cours à Auxerre.

Hervé IV de Donzy

Né en 1179, époux de Mahaut de Courtenay, comte de Nevers de 1199 à 1223.
Monnaie du Nivernais Hervé IV de Donzy 1.jpg
+COMES ERVEVS (face 1) +NIVERNIS CIVIT (face 2)
Monnaie du Nivernais Hervé IV de Donzy 3.jpg
+ERVIS CONS (face 1) +NIVERSCIS (face 2)
Sur ces deux spécimen on retrouve la faucille et la fleur-de-lis apparaît sur l'un d'eux. Celle-ci aurait pu être prise par Hervé de Donzy suite à son mariage avec Mahaut de Courtenay qui était de sang royal.
La plus ancienne variété est certainement celle qui porte ERVEVS avec l'étoile.
La présence de CONS pourrait correspondre au mot consul, titre que prenaient parfois les barons féodaux.
Certaines chroniques donnent aux comtes le titre de consul et aux vicomtes celui de proconsul.

Guy IV de Forez

Né vers 1199, second époux de Mahaut de Courtenay, comte de Nevers de 1226 à 1241.
+NIVERNIS CIVIT (face 1) +GVIDO COMES (face 2)
Sur cette pièce un dauphin remplace la fleur-de-lis de la monnaie d'Hervé de Donzy. Une pomme de pin traverse la croix à branches égales. Cette pomme de pin rappelle les armes de Donzy.
Certains numismates ont attribué cette pièce à Guy 1er qui gouverna le Nivernais de 1168 à 1176.
Georges de Soultrait pense qu'elle doit être attribuée à Guy de Forez car son style ne correspond pas au style utilisé au 12ème siècle et l'apparition du dauphin qui forme le blason de la maison de Forez n'aurait aucune signification sur une monnaie de Guy 1er.
+COMES GVIDONI (face 1) +NIVERNIS CIVIT (face 2)
Pour exemple, sur la pièce ci-dessus qui appartient à Guy 1er, on remarque la faucille entre un croissant et une étoile. Le dauphin n'est pas présent.
Dans une ordonnance de 1226 qui se rapporte au monnayage de Guy de Forez, Saint-Louis règle que les monnaies nivernaises auraient cours uniquement dans les domaines du comte.

Mahaut II et Eudes de Bourgogne

Mahaut II, née vers 1234, fille de Yolande de Châtillon et de Archambaud IX de Bourbon ; Eudes, né en 1231, fils de Hugues IV et de Yolande de Dreux.
Après la mort de la comtesse Yolande, petite fille de Mahaut de Courtenay et de Hervé de Donzy, le comté de Nevers passe à sa fille aînée Mahaut II mariée à Eudes.

+.M. COMITISSA (face 1) +NIVERNIS CIVIT (face 2)


Monnaie du Nivernais Mahaut II 1.jpg
Monnaie du Nivernais Mahaut II 2.jpg
Monnaie du Nivernais Mahaut II 3.jpg
Pièce attribuée à Mahaut II par Georges de Soultrait avec, de nouveau, la fleur-de-lis moins étalée que sur les pièces d'Hervé de Donzy, deux étoiles en face.
Il semble plus logique que cette pièce soit attribuée à Mahaut de Courtenay car Mahaut II n'a hérité du comté de Nevers qu'à la mort de sa mère en 1257. De plus, elle était déjà mariée à Eudes avant d'hériter du comté et il n'y a donc aucune raison pour qu'elle ait frappé de la monnaie à son nom. Mahaut II a administré le comté de Nevers de 1257 jusqu'à sa mort en 1262.
+O DOC OME S (face 1) +NIVERNENSIS (face 2)
Monnaie frappée au nom de Eudes, mari de Mahaut II. Sur la pièce, à gauche, un écu aux armes de Bourgogne-ancien ; à droite, une croix avec un croissant.
Entre la mort de Mahaut II et le mariage de Yolande, fille aînée de Mahaut II et de Eudes, ce dernier administre le comté pendant trois ans, comme tuteur de sa fille et émet des monnaies en cette qualité. Le monnayage d'Eudes est encore présent en 1267.

Jean Tristan

Yolande, fille aînée de Mahaut II et de Eudes de Bourgogne épouse en 1265 ou 1266 Jean Tristan comte de Valois, quatrième fils de Saint-Louis. Il meurt de la peste à Tunis le 3 août 1270 et ne laisse aucune postérité.
Monnaie du Nivernais Jean Tristan 1.jpg
+.I. F' : REGIS FRANCIE (Johannes filius)
+CO : NIVERNENSIS
Bien que comte de Nevers pendant une courte période, il laisse néanmoins quelques variétés de pièces, dont l'exemplaire ci-dessus. Sur l'image de gauche, on remarque les branches de la croix qui se terminent par trois pointes semblables à celles que l'on trouve parfois sur les monnaies d'Auxerre. Sur l'image de droite, deux fleurs-de-lis et deux étoiles disposées de manière à former une croix.

Robert de Dampierre ou Robert III de Flandre

Veuve de Jean Tristan, Yolande se remarie en mars 1271 avec Robert de Dampierre dit Robert de Béthune du nom de sa mère, né vers 1247, comte de Nevers jusqu'à la mort de son épouse en 1280 ; devient comte de Flandre en 1305 après la mort de son père.
Il administrera le comté de Nevers au nom de son fils mineur Louis, jusqu'en 1296.
+ROBERTVS COMES
+NIVERNENSIS
Monnaie du Nivernais Robert de Dampierre 3.jpg
Monnaie du Nivernais Robert de Dampierre 4.jpg
Ci-dessus trois variétés de pièces de Robert de Dampierre. Les légendes sont semblables à celles de Jean Tristan ; est à remarquer l'apparition du lion des armes de Flandre sur deux specimen. Cette monnaie était frappée à Clamecy.

Louis 1er de Flandre

Né en 1272, fils de Robert de Dampierre, comte de Nevers de 1296 à 1321.
C'est en 1296 que Louis fait son entrée à Nevers et commence vraisemblablement à faire battre monnaie à son nom en imitant le type de son père.
+LVDOVICVS COMES (face 1) +NIVERNENSIS (face 2)
Louis 1er de Flandre sera le dernier comte de Nevers à monnayer. Louis II de Nevers et Louis de Male ne frappèrent monnaie que dans leurs comtés de Flandre et de Rethel.
Jean II le Bon achète le droit de monnayage du comté de Nevers en 1355 pour 1300 écus d'or. Cette somme ne sera jamais payée. Le règlement de cette dette fera l'objet d'un arrangement amiable par Charles V lors du mariage de Philippe-le-Hardi avec Marguerite, fille du comte de Flandre et de Nevers.
La fin du monnayage de Nevers date de 1322.
1355 correspond à la date de fin juridique de ce monnayage.

  • (1) Recueil de copies d’actes relatifs aux droits d’un monastère ou d’une église.
    (2) Ensemble de points en relief qui entourent la monnaie.
    (3) Ensemble des lois régissant des liens de dépendance entre un seigneur et un vassal.
    (4) Droit du vassal d’user et de profiter de la terre.


  • Sources :
Essai sur la numismatique nivernaise par Georges de Soultrait,
Site cosmovisions,
Site amicale numismatique nivernaise
Images : Sites internet.


--Mnoel 11 octobre 2015 à 16:50 (CEST)